Kurt Wagner est de retour. Une bonne chose, pour ce mutant velu qui a toujours été une des ancres morales de son groupe, les X-Men. Kurt est un gentil personnage, vrai de vrai. Animé par des valeurs humanistes certaines, doté d'une foi sincère qui l'avait poussé à embrasser la carrière ecclésiastique, Diablo (son petit nom durant des années en Vf dans Special Strange) a manqué les dernières années de péripéties mutantes, et quand on voit ce qui s'est déroulé en son absence (Scott Summers qui assassine Charles Xavier, les X-Men traqués comme des terroristes) on se dit que peut être sa sagesse et sa tempérance ont fait défaut à plusieurs de ses coéquipiers et amis. Pour son come-back parmi les vivants, Chris Claremont a été sorti de la naphtaline, pour présenter un scénario classique et old school, tant sur le fond (le combat en salle des dangers, Kurt qui retrouve bien vite sa sorcière bien aimée, Amanda, et qui vide des bières avec Wolverine) que sur le forme (la mise en place est assez formaliste, on rappelle qui sont les personnages et leurs pouvoirs en plein milieu d'un combat simulé, ces derniers ne peuvent s'empêcher de deviser durant l'action, comme dans un bon comic-book des années 80...). Autre petit moment d'intimité d'importance, la conversation entre Nightcrawler et Rachel Summers, qui est là sans doute pour faire la jonction avec la période "Excalibur" des deux héros, car autrement, elle n'apporte pas grand chose à la dynamique de cette série. Le retour du mutant à la fourrure bleue, ses rapports avec ses anciens équipiers, sa tentative de retrouver une place dans un milieu à la fois familier et fort différent, semblent les clés de lecture d'un titre pas novateur pour un sou, qui prend la suite directe des événements narrés dans les premiers numéros de Amazing X-Men, de Jason Aaron. Le vilain que Chris Claremont imagine pour l'occasion est une sorte de robot qui se réplique, Trimega, et qui parait à première vue invincible. On ignore tout de ses motivations, on le voit juste cogner et tenter de se débarrasser d'Amanda Sefton, distribuer des claques à la ronde, mais on ne passionne pas pour autant. Loin de là...
Chris Claremont a-t-il encore quelque chose d'intéressant à dire. Question plus pertinente encore, lui laissera t-on dire quelque chose de pertinent, si cela devait être possible? Avec cette nouvelle série l'auteur repêche bon nombre de personnages secondaires qu'il avait déjà utilisé il y a des années de cela: la famille de Kurt Wagner est présente, avec Amanda, sa mère adoptive, ses amis et collègues du cirque où il a grandi. Mais la plupart de ces personnages n'ont pas beaucoup de charisme et on ne s'y attache pas vraiment. Il faut en fait attendre les dernières pages du 5e épisode pour vraiment comprendre ou veut en venir le scénariste, en quoi le retour de Nightcrawler peut se révéler tragique. J'ai tout de même des doutes sur la possibilité de vraiment considérer cette série comme viable dans le temps. Elle aurait constitué une très bonne mini en cinq ou six parties, avec un peu plus d'inspiration. Le dessinateur est Todd Nauck. Pas trop de rodomontades, des planches propres, lisibles, bien construites, c'est assez agréable sans être foudroyant. Reste à comprendre où veut en venir Chris : souhaite t-il nous offrir de l'introspection, un mutant qui doit se rapproprier son identité et son rôle, ou une banale histoire super-héroïque à base de menace stéroïdée et d'adversaires absurdes et aux muscles crispés? Claremont je l'ai adoré, à son apogée, mais l'essentiel de sa production plus récente a fortement du mal à entrer en adéquation avec nos attentes moins naïves, et même quand il se lâche et propose des choses audacieuses et bouleversant le statu-quo (X-Men Forever est un bon exemple) il confond changement, évolution, avec réécriture à la hache de ses plus beaux personnages, qu'il n'hésite pas à malmener sans aucune logique. Chris fait ici le contraire : un calque de la bonne époque, entre clins d'oeil aux scènes d'autrefois (Kurt et Rachel Grey) qu'on retrouve même déclinées en posters dans des fonds de case, ce qui nous révèle que les X-Men sont comme leurs lecteurs, nostalgiques d'une époque qui ne reviendra plus, et qui nous manquera toujours. Nightcrawler, la série actuelle, est juste anecdotique.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Vous nous lisez? Nous aussi on va vous lire!