Première remarque d'importance avant d'aborder le second tome de Damn Them All (paru chez Delcourt): si vous n'avez pas lu le premier, il est inutile de commencer par celui-ci. C'est que l'histoire est assez complexe et qu'il ne fera de mal à personne de dépoussiérer un peu les événements du précédent. Pour faire simple, disons que Simon Spurrier a décidé d'écrire l'histoire idéale de Hellblazer/John Constantine qu'il avait dans ses tiroirs, depuis qu'il a quitté le personnage. Mais en remplaçant le protagoniste par Ellie "Bloody El" Hawthorne, une sorte d'anti-héroïne qui elle aussi fait des merveilles dans le domaine de l'occultisme. Le lecteur l'a rencontrée alors que son oncle, qui l'a initiée aux arcanes de l'étrange, est décédé et que 72 démons de l'Ars Goetia ont été libérés et ont investi notre monde physique (la ville de Londres, en fait). Bonne nouvelle, il suffit d'un simple artefact pour pouvoir les contrôler, s'en servir pour des basses besognes. Mauvaise nouvelle, il y a pas mal de monde sur l'affaire et certains ont des intentions beaucoup moins nobles que d'autres. Quant à Ellie, elle passe son temps à jurer, boire, se droguer, se battre et elle a souvent à portée de main un marteau rouillé, dont elle se sert pour asséner ses opinions les plus prononcées. Bref, comme vous le voyez il y a à la fois du mysticisme, de l'humour et de l'action, et le cocktail est détonnant. Ellie est aussi accompagnée par un des démons, Glasya-Labolas, qui a pris l'apparence inoffensive d'un chien et qui la suit un peu partout. Ensemble, ils tentent de défaire ce qui a malheureusement déjà été fait et de renvoyer les autres créatures de l'enfer là d'où elles sont venues. Ils auraient bien une piste, un moyen de parvenir à remplir la mission, en allant par exemple exhumer le cadavre de l'oncle Alfred et en se servant du corps, mais ils ont beau creuser, tout ce qu'ils découvrent sous terre, c'est une tombe vide, entourée de bougies magiques. Enfin, le club 500, lui, a bien d'autres objectifs pour eux : tous ces démons disponibles sur le marché sont autant d'armes à utiliser et de l'argent à faire fructifier.
Le point positif avec le second tome et la conclusion de cette série, c'est vraiment le personnage d'Ellie, la manière avec laquelle elle est représentée sans concession. Impossible de ne pas saisir la portée du nihilisme et de la radicalité de cette "héroïne" tandis que Spurrier nous étonne par quelques retournements de situation inattendus, et avec une histoire où les bons ne sont pas foncièrement bons, et où les mauvais sont plus des victimes que de véritables démons enclins à faire le mal. Par contre, le scénariste a tendance à user et abuser de petites phrases tout faites, assez creuses, d'aphorismes de bas étage, qui viennent parfois alourdir le texte et le récit. Ce n'est pas parce que le vocabulaire est riche et que la sentence semble profonde qu'il y a derrière quelque chose de réellement intelligent ou pertinent pour le lecteur. Charlie Adlard au dessin est assurément une valeur ajoutée importante pour Damn them all; son travail est ici mis en couleur par Sofie Dodgson et on se rend compte qu'il accorde plus d'importance et d'ampleur aux détails, qu'il offre des planches plus soignées et susceptibles de retenir l'œil de ceux qui habituellement le dédaigne, qu'il ne le fait par exemple avec Walking Dead, où nous sommes à un autre niveau d'abstraction. Damn them all est donc en définitive un bon moment de lecture, qui reste toutefois probablement très hermétique si vous l'envisagez d'un œil distrait et si vous ne tentez pas de tout lire d'un coup, pour bien comprendre les enjeux et en apprécier les coups de théâtre. Spurrier a bien failli se prendre les pieds dans le tapis et il aurait pu faire plus simple, mais au final, ça justifie totalement l'achat.
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