Il est inutile d'avoir étudié la Bible durant des années pour connaître l'histoire de Caïn et Abel. Les deux premiers frères de l'humanité, mais aussi le premier meurtre de l'histoire. Ces deux-là sont les fils d'Adam et Eve, qui après avoir été chassés du Paradis, vivaient sur une terre idyllique où n'existaient pas les conflits, la mort, la guerre, jusqu'au jour où Caïn décida donc d'assassiner son frangin. Tout ceci est admirablement bien raconté par Jason Aaron, dès le premier épisode de la série The Goddamned. Comme le dit lui-même le personnage principal : (Caïn dixit) mon frère était un sale con, nous étions les deux premiers nés du monde et on ne pouvait pas se blairer... un jour ce bâtard m'a tellement énervé que j'ai fait ce que personne n'avait jamais fait, je l'ai tué. Depuis ce geste extrême, 1600 ans ont passé et ce qui était autrefois une planète formidable et accueillante est devenue un enfer sur Terre. L'action se déroule au milieu des corps ensanglantés, de la guerre continue, dans la fange, la crasse et la violence. Dès les premières planches on comprend que ce sera sanguinolent, sans aucune pitié. Les êtres humains qu'on croise ressemblent plus à des bêtes assoiffées de sang. Voilà que débarque dès le tout début de la série une petite armée de barbares, avides de destruction, alors que Caïn vient à peine de relever la tête, après avoir passé des heures à récupérer et se régénérer la tête dans une fosse à purin. Il se reprend rapidement et sauve la vie d'un petit gamin. Mais Caïn reste avant tout un solitaire, condamné à errer car malheureusement, ne pouvant pas même mourir. Une atroce ironie du destin, le choix d'un Dieu qu'il renie profondément et semble bien rire à ses dépends.
Caïn n'est pas la seule tête d'affiche de ce premier tome. Avant le déluge, cela veut dire que fort naturellement, Noé est de la partie. Le patriarche chargé de repeupler la Terre après la colère divine et la noyade généralisée est ici présenté de bien singulière façon. Lui aussi est un guerrier barbare, une sorte de braconnier/esclavagiste qui se plait à semer la destruction, à imposer la loi du plus fort. Il est engagé dans le processus de construction de son arche, mais c'est une véritable ordure, loin de ce que nous expliquent les textes sacrés. Forcément le conflit entre Noé et Caïn ne va pas tarder à exploser, le second cité attendant de croiser la route d'un être assez puissant pour enfin le tuer, et lui offrir ce repos qu'il pourchasse en vain. Au passage, il va sauver Aga, veuve en détresse dont le fils Lodo a été enlevé, et ça va être un vrai carnage organisé, presque à chaque page. The Goddamned, ce n'est pas pour ton petit frère de douze ans.
Le dessin est l'oeuvre de R.M.Guéra, qui retrouve ainsi Jason Aaron, après l'excellente série Scalped. Désolation, sauvagerie, esthétique du sale et du délitement, c'est horrible et en même temps c'est beau, puissant, prenant. Assurément, l'artiste est à sa place, et peu d'autres auraient pu fournir un travail aussi pertinent. Les couleurs de Giulia Brusco magnifient cette apocalypse annoncée, dans un univers condamnée où aucune lueur d'espoir ne survient, sauf lors d'un bref flash-back lumineux et sarcastique.
The Goddamned a tout pour être une des grandes séries phares de l'été. A dix euros, le tome un semble se vendre à merveille, et Urban Comics tient là une oeuvre qu'on pressent majeure et incontournable.
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