Ses planches sont de toute beauté et nous emmènent dans le froid clinique de l'espace, avec une utilisation splendide du digital et une colorisation particulièrement inspirée, qui joue des contrastes en les poussant à leur paroxysme, et "mange" littéralement toute possibilité de laisser la moindre zone blanche, en remplissant le vide par l'espace et ce qui s'y déroule. Parfois la page se libère des contingences du récit classique pour démultiplier les petites vignettes ou les petites scènes, prenant ainsi le risque d'étourdir le lecteur, mais cette attention aux détails, cette minutie qui souligne des faits en particulier, sont couplées a des doubles pages ou des splash pages à très fort impact. Les combats sont épiques, au point de figurer parmi les représentations les plus saisissantes du genre depuis bien longtemps. Le layout est inventif, cherche en permanence à jouer avec l'équilibre et les contingences classiques du média, et l'histoire oscille entre plongées dans l'immensité sidérale, parsemée de ces cadavres fantasmagoriques qui ne sont pas sans rappeler les Célestes de l'univers Marvel, colosses inanimés et dépecés, et percées claustrophobiques à l'intérieur des vaisseaux spatiaux, où c'est une orgie de néons, de lasers, qui nous assaille. Di Meo ne triche jamais, et là où beaucoup d'autres semblent rechercher le moyen de travailler en digital tout en conservant une "âme" traditionnelle, ici tout est adouci, définitivement assumé, patiné, et merveilleusement soigné. S'il faut trouver un petit point faible dans ce WOFTWTD (plus simple que le titre original à rallonge) on ira titiller Al Ewing qui après les deux premiers épisodes totalement dingues et porteurs de grandes promesses, commence à livrer un récit plus classique, où les interactions entre les personnages, avec des sauts récurrents entre passé et présent, éclipsent un peu les grands enjeux du départ. Heureusement quand on insiste on se rend compte que cette introspection est essentielle pour maintenir une attache humaine à cette histoire, qui autrement prendrait le risque de se désincarner. D'ailleurs on referme le premier tome avec le grand événement que nous attendions (ça semble assez évident) et sans avoir la moindre idée ou la moindre réponse sur le pourquoi ces dieux colossaux n'apparaissent qu'à leur mort. Et ce n'est pas un reproche, juste l'assurance qu'il nous faut la suite, et vite! Une fresque humaniste et politique, sociale et dramatique, que cette nouvelle série publiée chez Boom! et qui s'ajoute au catalogue décidemment alléchant de Hi Comics. Succès attendu et garanti.
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