Dans ce contexte, Lucky Luke est contraint de jouer les médiateurs entre les différentes parties. En naviguant entre humour, quiproquos et réflexion sur les bouleversements sociaux de l'époque, il met en lumière les défis d'une Amérique façonnée par ses nombreuses influences culturelles, dont l’héritage allemand reste encore bien vivant aujourd'hui. Puisqu'il s'agit de la 125e histoire qui met en scène Lucky Luke, on pourra pardonner au personnage quelques petits pépins de santé, ce qui amène le médecin à qui il rend visite, en début d'album, à lui affirmer "qu'un jour ce sera votre ombre qui tirera plus vite que vous". Magie de la bande dessinée, les héros de notre enfance ne partent jamais à la retraite et ne se retrouvent pas rattrapé par le poids des ans, ou presque. Le point fort de toute la série, c'est finalement de parvenir à raccrocher des faits historiques avec l'humour de l'aventure en BD : Lucky Luke a toujours été beaucoup plus pertinent et intelligent que certains pourraient le croire, généralement les mêmes qui refusent de feuilleter, sous prétexte que ça n'est pas assez noble pour leurs goûts élevés. Jul parvient à nous faire sourire d'un bout à l'autre, même si les gags sonnent plus juste et fins dans la première partie, ou apparaît d'ailleurs un ancêtre de Donald Trump (puisque la famille du futur président américain appartient en effet à ces allemands qui un jour ont décidé de traverser l'Atlantique). Achdé s'en sort bien au dessin, et si jamais sont trait n'atteint pas la pureté stylistique de celui de Morris, il est capable de donner un poil d'énergie et de souplesse au cowboy, c'est-à-dire aussi de modernité, qui a pu lui faire défaut par le passé. Bien entendu, il ne faut pas demander à ce Lucky Luke d'être ce qu'il ne pourrait pas incarner en l'état, c'est-à-dire un album qui révolutionne la légende, à placer au panthéon du genre. L'important est ailleurs, dans le caractère attachant et drôle d'un Lucky Luke qui évite l'écueil de passer pour un briseur de grève, sans pour autant apparaître comme un gauchiste convaincu. Il semble au final lui aussi dépassé par les événements, dans un décor citadin qui ne lui est normalement pas familier. N'empêche, ça fonctionne assez bien, au point que ce cow-boy sous pression soit recommandable sans rougir.
LUCKY LUKE : UN COW-BOY SOUS PRESSION
LE TOURNOI DES CHAMPIONS EN… MARVEL MUST HAVE ?
Vous pensez que des personnages comme Hulk, Thor, Les Quatre Fantastiques, ou encore Cyclope et Jean Grey, entrent de droit forcément parmi les cadors de cette aventure… il n'en n'est rien (enfin pas tous). C'est surtout le prétexte à proposer des justiciers absurdes et venant d'endroits où le super-héroïsme n'est normalement pas une priorité. La Mort elle-même peut trembler, voilà que débarquent sur scène des pointures extraordinaires comme le Faucon Pèlerin qui représente la France, ou encore l'Homme Collectif pour la Chine (Jamie Madrox a porté plainte) et Blitzkrieg pour l'Allemagne (la palme de l'originalité). John Romita Jr, encore très jeune et appliqué, a su trouver un style réaliste et finalement bien plus classique que ce qu'il fait aujourd'hui, et parvient à mettre l'ensemble en action, avec conviction et sans grosses bévues. De ce côté-là, le Tournoi des Champions fonctionne, et il nous jette à la figure des affrontements improbables, des dialogues qui sentent bon les années 1980, et une trame chancelante qui tient à peine debout. La chose la plus intéressante est peut-être de voir les tensions internationales qui naissent inévitablement, comme par exemple lorsque l'israélienne Sabra rencontre le Chevalier d'Arabie, dont les pouvoirs consistent à planer sur un tapis volant… c'est très caricatural, truffé de raccourcis et c'est pour ça que finalement on se prend au jeu ! Vous adorerez également l'aborigène Talisman, l'argentin Defensor (olé) ou Shamrock pour l'Irlande (qui se méfie de Captain Britain). Avec tout ça, il y avait matière à organiser la Coupe du Monde, plutôt qu'un tournoi des Champions. Si vous parvenez à relire ces pages en conservant en tête qu'il s'agit de troisième degré dorénavant, vous allez peut-être apprécier cette parution. En bonus vous allez lire aussi 2 annuals des Avengers West Coast et Avengers "tout court" qui constituent un peu un appendice au Tournoi des Champions, avec à nouveau Le Grand Maître qui fait des siennes, et des héros qui se tapent momentanément dessus par Tom De Falco, Bob Hall, Al Milgrom, et un aréopage de guest stars). Vive le vintage, mais de là à qualifier ça de must have…
Bonne année à tous!
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LUCKY LUKE : UN COW-BOY SOUS PRESSION
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