VENOM THE LAST DANCE : UN DERNIER VOLET (IN)DIGNE DES DEUX AUTRES ?
LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : LA 3e KAMERA
- La sortie de l’album Les météores que nous devons au scénario de Jean-Christophe Deveney, au dessin de Tommy Redolfi et le tout est édité chez Delcourt
- La sortie du deuxième tome de la série Inoubliables que l’on doit à Fabien Toulmé et qui est édité chez Dupuis
- La sortie du 7e tome de la série Les aigles de Rome, un série que l’on doit à Enrico Marini et aux éditions Dargaud
- La sortie de l’album Eurydice que signe Lou Lubie au scénario, Solen Guivre au dessin et qui est édité chez Delcourt
- La sortie de l’album Les femmes ne meurent pas par hasard que l’on doit au scénario de Charlotte Rotman qui suit l’avocate Anne Bouillon, au dessin de Lison Ferné et c’est publié aux éditions Steinkis
- La réédition en intégrale du Spirou que l’on doit à Émile Bravo baptisé L’espoir malgré tout, un titre paru aux éditions Dupuis.
SOMNA : LE PLAISIR DÉMONIAQUE DE CLOONAN ET LOTAY
Somna est le fruit d'une équipe artistique exclusivement féminine. Becky Cloonan, qui s’occupe de la majeure partie du « monde réel », démontre qu'elle a vraiment atteint une forme de maturité enviable. Elle excelle dans la représentation des costumes d'époques, apporte un soin méticuleux aux détails. Tula Lotay, en revanche, se concentre sur les rêves. Ses planches sont construites sur un modèle différent et plus libre, elles privilégient des gros plans suggestifs : des mains, des visages, des corps dans des poses lascives. C'est elle qui doit insuffler la charge érotique puissante qui porte toute l'œuvre et elle y parvient particulièrement bien ! Son usage de couleurs vives confère à la plupart des scènes un attrait tentateur et onirique bienvenu, et le lecteur parvient vite à ressentir ce qui faire peur et dans le même temps attirer irrésistiblement Ingrid, qui accepte l'inavouable et y succombe rêve après rêve. Car oui, Somna parle de sexe, et bien que les dessins ne soient pas non plus pornographiques (des caresses appuyées, des corps nus qui s'étreignent, mais les parties intimes restent dans l'ombre) les scènes de passion physique sont celles qui rythment l'ensemble, qui caractérisent l'évolution du personnage féminin, qui vont aussi amener à sa chute. Un choix narratif et thématique qui sied parfaitement au style de Lotay, dont le travail a toujours porté une dimension érotique affirmée, visible même dans ses couvertures d’œuvres dites grand public. Une tension émerge entre ce que les deux artistes essaient de raconter et cette sensualité omniprésente. Les personnages féminins, et occasionnellement masculins, sont des objets de désir magnifiés, ils sont tous beaux, esthétisés, sauf le prêtre libidineux qui est une caricature de cette religion abjecte dans sa volonté de dominer grâce à l'hypocrisie. Le démon existe bien, mais il est à trouver dans le cerveau malade de ceux qui voudraient nier l'accès à la sexualité, plutôt que dans la luxure présumée de celles qui acceptent d'embrasser le plaisir physique, comme la plus naturelle des choses. Somna a remporté l'Eisner Award de la meilleure nouvelle série, cet été à San Diego. Venant de la culture puritaine et chafouine par excellence, la récompense n'en a que plus de prix. Il s'agit aussi, soulignons-le, du premier album targué Delcourt, qui adapte en Vf des histoires publiées chez DSTLRY, un nouvel éditeur qui compte dans son catalogue naissant et à venir des poids lourds du secteur. L'ouvrage est d'une beauté évidente, et brille comme un cadeau implacable.
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L'ÉXÉCUTEUR : L'INTÉGRALE SIGNÉE WAGNER ET RANSON CHEZ DELIRIUM
Exton, le personnage central, devient de plus en plus fascinant à mesure qu’on tourne les pages. Au fil de son existence, il a même la chance de connaître quelques instants de relative tranquillité, qu’il aurait pu exploiter pour tenter de se reconstruire. C'est le cas au début de Les Proies, troisième volet de cet ouvrage. Hélas, entre un peu de déveine et une tendance presque compulsive à chercher les ennuis, il finit toujours par retomber dans ses travers. Et, inévitablement, c'est le Jeu qui le rattrape. L'ultime partie de cette sombre trajectoire est particulièrement marquante : Exton, désormais désigné comme la cible à abattre aux yeux de tous les autres gros joueurs, devient le gros lot final d'un tournoi qui ressemble à une chasse à l'homme dramatique. En parallèle, un film inspiré de tout ce que nous venons de lire s’apprête à sortir en salle et brouille la frontière entre plusieurs niveaux de fiction, que juxtapose le scénario de Wagner. L’exécuteur suprême finira-t-il par être lui-même exécuté, ou la proie ne fera-t-elle qu'une bouchée de ses chasseurs ? La réponse s’étale sur plusieurs dizaines de pages intenses, où des affrontements explosifs se succèdent. Dans tout ce chaos, notre héros — qui n’en a jamais été un — transforme une forêt glaciale en un véritable champ de bataille, une zone de guerre dont personne ne ressort indemne. Son territoire, un cimetière pour les autres. Il faut saluer ici le travail remarquable du dessinateur, Arthur Ranson, qui insuffle une ampleur vibrante à chaque planche. Les cadrages sont inventifs et variés, souvent focalisés sur de petits détails ou des éléments en apparence secondaires. Cette approche met en lumière le caractère désespéré et aléatoire de ces duels mortels, où la vie humaine ne vaut qu’un paquet de billets promis par une voix anonyme au bout d’un téléphone. La couleur se révèle souvent glaciale, le trait raffiné et chirurgical; impossible de ne pas être happé par un binôme qui fonctionne à merveille et ne nous laisse jamais le moindre moment de répit (tout comme c'est aussi le cas pour Exton). Initialement prévu pour être publié dans un magazine britannique qui a rapidement cessé de paraître, L’Exécuteur a finalement trouvé sa place dans les pages de la célèbre revue anthologique 2000 A.D.. Habituellement orienté vers la science-fiction, l'hebdomadaire a su reconnaître le génie de cette œuvre, portée par un humour anglais à la fois froid et sarcastique, savamment distillé, qui fait mouche. Retrouver les trois parties réunies dans une belle intégrale est un pur plaisir. Cette brique compacte retrace la trajectoire mortifère d’un homme programmé pour tuer, mais qui tente désespérément d’échapper à son propre sort. Tout en se révélant extrêmement doué pour ce à quoi on le condamne, au point d'inverser in fine les rôles et d'alimenter un carnage qui ne cesse jamais. C’est l’un de ces cadeaux de fin d’année pour lesquels on ne peut que remercier l’éditeur Delirium et sa passion inébranlable pour la bande dessinée de genre venue d’outre-Manche. Qui regorge de trésors : la preuve !
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MARVELS : VERSION ANNOTÉE ET ULTIME POUR LE CHEF D'OEUVRE DE BUSIEK ET ROSS
Mais tout ceci ne serait pas un chef d'œuvre reconnu sans la partie graphique, sans les dessins magnifiques d'un certain Alex Ross. Son style est hyperréaliste, et emprunte beaucoup à la photographie. D'ailleurs, avant de dessiner ses planches, Ross demandait à certains proches de prendre la pose en costume, afin de réaliser des clichés lui permettant d'accentuer l'effet final escompté. Ce qui explique pourquoi certaines cases ressemblent à s'y méprendre à des photos. Je me souviens avoir été bluffé par ce Spider-Man grimpant le long d'un building, ou par ma rencontre avec les X-Men des origines, à la première lecture de ce Marvels. A quoi ressembleraient donc Giant-Man, la Chose, ou Namor, s'ils existaient vraiment, autrement que comme incarnations de movies super-héroïques? Ross livrait déjà une réponse éloquente dans les années 1990, avec une minutie, un soin du détail jamais égalé avant lui. Regardez ce jeune Scott Summers, traqué et surpris dans une ruelle sombre, avec son viseur lumineux. Jamais un mutant n'aura été dépeint avec autant de justesse; en une planche c'est toute l'hystérie anti-mutante, toutes les craintes et les angoisses dont Claremont nous a abreuvés, qui prennent corps et deviennent tangibles. Hulk n'a jamais été aussi puissant et monstrueux à la fois, et que dire de Galactus, dont l'arrivée est le point d'orgue de l'inimaginable devenu quotidien. Bien sur, un tel succès ne pouvait qu'entraîner une série de suites plus ou moins officielles et réussies, ou d'épigones surfant sur la vague. Busiek réalisa Astro City (formidable) , ou encore Arrowsmith (publié chez Delcourt), et Alex Ross le suivit durant son parcours, quelques temps. Chez Marvel on put lire des titres comme Code of Honor (les super-héros vus cette fois à travers les yeux d'un flic, la trame familiale jouant là également un grand rôle dans l'économie du récit) ou plus tard Eye of the Camera (l'oeil de l'objectif), qui marque le retour de Phil Sheldon sur la scène. Mais jamais plus la grandeur et la beauté de Marvels n'a été atteinte à nouveau. Cette nouvelle (sublime) version est disponible dans un format géant avec dos toilé, et vous livre bien des secrets, les annotations pour comprendre le dessous des cartes, le scénario et les instructions originales, des détails et des illustrations inédites. 504 pages qui vont jusqu'au bout du bout des choses, le cadeau ultime pour ceux qui en veulent toujours plus, encore plus. Pour les autres, un simple Marvels dans la collection Must Have fera l'affaire, à seulement seize euros.
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UniversComics Le Mag' 45 Septembre 2024 84 pages Dispo ici : https://www.facebook.com/groups/universcomicslemag/permalink/1049493353253...
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