Il ne faut pas toujours écouter l'establishment et ses délires d'omnipotence. Regardez Marvel's Iron Fist, par exemple. Certains grands médias et autres institutions du genre ont pu bénéficier d'une vision anticipée des premiers épisodes de la série. Conséquence de tout ceci? Un petit déluge de critiques négatives avant même que ne soit disponible la nouvelle production Netflix, et une envie évidente chez certains de laisser tomber l'affaire avant qu'elle ne soit disponible intégralement pour les spectateurs potentiels. Et pourtant, Iron Fist n'a rien de ce ratage redouté, et ne dépareille pas à coté des autres séries qui l'ont précédé. Le premier épisode est fichtrement bien troussé, par exemple. C'est une introduction quasi parfaite au personnage de Danny Rand, son parcours, son drame, ce qu'il est devenu. Quiconque n'a jamais entendu parlé de Danny parvient en moins d'une heure à savoir ce qu'il faut savoir, tout en conservant cette part de mystère, qui sera peu à peu explicitée, et sera une des intrigues à approfondir dans ces treize épisodes à explorer d'un coup.
Imaginez donc le retour aux affaires du type, après avoir disparu durant de longues années. A son départ Danny n'était qu'un gamin de dix ans, un peu malingre et couvé par ses parents, la richissime famille Rand. Un accident d'avion dans les montagnes de l'Hymalaya, et un parcours initiatique qui se ne révèle au départ que par bribes, et l'enfant est devenue une arme vivante, dont la somme de la maîtrise de ses dons se concrétise sous la forme du "poing d'acier" (qui donne son nom à Iron Fist) auquel rien ne résiste. Ses seules attaches à New-York sont Joy et Ward Meachum, les fils de l'associé de son père, qui est lui aussi décédé (appremment) entre temps. Sauf que pas tout à fait, et c'est là encore une des pistes qui va être exploré, sachant que la véritable menace est encore plus insidieuse et redoutable, bien entendu.
Danny Rand n'existe donc plus. Tout le monde le considère comme mort après le tragique accident d'avion. Il n'a aucun moyen de prouver sa véritable identité, et personne n'envisagerait un instant qu'il ait pu survivre, rester absent si longtemps, et se pointer un beau jour pour récupérer sa vie et son nom. Alors quand il le fait (quel toupet!) on l'envoie directement chez les dingues. Une plongée dans l'univers carcéral de la folie, une remise en question totale de son être, avec en toile de fond la détestation et la cupidité du fils Meachum, qui voit d'un très mauvais oeil la résurgence de celui qui détient encore par ses origines 51 % du capital de la corporation Rand-Meachum. Iron Fist sous sédatif et camisole, bonjour le retour à la civilisation...
La première étape pour le personnage sera donc l'acceptation aux yeux de la société de son existence. Sa persistance. Il n'est pas mort, il est revenu, et il est devenu autre chose. Bien sûr, la plupart du temps une tentative honnête d'explication apparaît tellement invraisemblable que l'excuse de la folie est pratiquement pardonnée. La série démarre de manière intimiste mais claire, rate un peu le coche lors des combats et des scènes d'arts martiaux, qui semblent filmées au ralenti, avec des coups qu'on sent venir à l'avance, et une chorégraphie de la violence qui semble artificiel, trop peu fluide. Mais les acteurs sont tous à leur place. Les Meachum sont tout bonnement parfaits, avec Joy la soeur en garce manipulatrice qui conserve un bon fond et paraît être l'ancre à laquelle peut espérer se raccrocher Danny. Ward, le frère, écrasé par l'ombre de son paternel, se noie dans les secrets et un costume trop grand pour ses frêles épaules. Le père enfin, cynique, calculateur, n'aimant que sa propre personne, et pourtant pris au piège des ses mensonges et du lourd tribut à payer à ceux qui l'ont ramené à la vie, pour servir leurs intérêts. Sans oublier la belle et fougueuse Colleen Wing, ici enseignante dans son dojo, aussi dangereuse que réfrénée. Mais elle également a beaucoup à accomplir et assouvir, et les voies de la violence, une fois empruntées, mènent vers des horizons obscurs. Et parlons aussi de La Main, ces ninjas qui pullulent comme des cafards dans une arrière salle de restaurant miteux, qui envahissent la ville, l'infectent, et seront le trait d'union qui rapprocheront Iron Fist des séries précédentes, toujours chez Netflix. Je passerai sous silence les critiques acerbes et les remarques stériles sur le fait que l'essentiel du cast de la série est d'origine caucasienne, comme si le kung-fu et les arts martiaux ne pouvaient être que l'apanage de personnages asiatiques. Vouloir réduire Iron Fist à une appartenance locale ou régionale est d'une bétise insondable, et ne ferait que trahir la création originale de Roy Thomas et Gil Kane. Et puis Finn Jones est un choix bien meilleur que ce que je pouvais penser. Il est sobre, efficace, attachant sans en faire des couches, et on l'a doté d'un effet spécial particulier (le Iron Fist, concentré de ses dons) qui est un des trucs les plus cool vus dans une série ces dernières années. Le seul défaut majeur de la série en réalité, c'est de suivre peu ou prou l'architecture de la première saison de Daredevil, avec moins de flamboyance, et de servir en fin de compte de longue introduction aux Defenders à venir, en présentant le dernier personnage du groupe, dont le grand public n'a en règle général jamais entendu parler (c'était le cas aussi pour Jessica Jones, un peu moins pour Luke Cage). Voilà qui est fait, les pions sont sur la table. Ne comptez pas sur nous pour bouder notre plaisir ou faire la fine bouche. La perfection n'est pas de ce monde, et ce Marvel's Iron Fist est un divertissement qui se respecte. Open your mind and make your own opinions (proverbe zen à l'américaine).
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