DAREDEVIL BORN AGAIN : DD EMMÉNAGE CHEZ DISNEY + AVEC DIGNITÉ (EP.1/2/3)


 La simple logique des choses nous pousse toujours à nous méfier d'un produit qui subit de trop importantes mutations en phase de production en cours. Surtout lorsqu'il s'agit de la série Marvel culte par excellence, ce Daredevil qui a régalé durant trois saisons, à l'époque où tout cela était diffusé sur Netflix. Avec un changement de showrunner intervenu sans crier garde, (Dario Scardapane, l'homme derrière le Punisher, a repris les rênes de Born Again), le nouveau projet Disney+ paraissait voué à un destin discutable. Mais bonne nouvelle : le résultat est loin d'être mauvais et surclasse les plus récentes déceptions que nous venons de (très mal) digérer. Les réalisateurs Justin Benson et Aaron Moorehead insufflent à chaque épisode un vrai parti pris narratif et optent pour des choix narratifs audacieux, tandis que Scardapane s’efforce de sauver un projet qui, à l’origine, semblait réticent à embrasser le ton et la grandeur des épisodes diffusés sur Netflix, beaucoup plus musclés et sombres que ce que la plateforme Disney à l'habitude de nous refourguer sans vergogne. Au final, le résultat oscille entre l'esprit originel des saisons précédentes et une nouvelle direction, avec sa propre identité. Pour les fans qui espéraient avant tout retrouver Charlie Cox dans le rôle de Matt Murdock/Daredevil, Vincent D’Onofrio en Wilson Fisk/Kingpin, ainsi que Deborah Ann Woll et Elden Henson dans les rôles de Karen Page et Foggy Nelson, la série remplit son office, tout en cueillant les plus sensibles à froid. Le Tireur (Bullseye, pardonnez-moi, je suis un ancien) est lui aussi à nouveau en grande forme, et sa première mauvaise action est d'assassiner ce pauvre Foggy dans la premiers tiers du premier épisode. L’intrigue prend alors son envol avec un bond temporel significatif, et se concentre ensuite sur la campagne électorale de Wilson Fisk, bien décidé à devenir maire de New York. Les références à la politique contemporaine sont flagrantes : des parallèles sont tracés avec Donald Trump et Eric Adams, tandis que la série met en lumière les similitudes entre Matt et Fisk, deux hommes aux identités doubles, qui prétendent détenir la vérité tout en abreuvant le grand public de mensonges au sujet de qui ils sont vraiment. Karen a plaqué Matt pour digérer la perte de son ami Nelson (ou pour être exact, Matt a eu besoin de disparaître et la belle blonde en a eu assez d'attendre de ses nouvelles). Contre toute attente, l’absence de scènes d’action dans les premiers épisodes (enfin, une fois qu'on a passé la terrible attaque de Bulleye et le traditionnel plan séquence durant lequel Daredevil combat comme s'il s'agissait d'un ballet sanglant) s’avère être un atout : au lieu de plonger immédiatement dans des règlements de compte en costume, la série prend le temps d’explorer les motivations des personnages. Et sur ce plan, ils apparaissent tels des oignons. Une couche en cache l'autre, Daredevil et compagnie ont une vraie épaisseur à l'écran.



On craint parfois de tomber dans le redite, comme avec cette décision de Matt de renoncer à jamais (rires) au costume de Tête à cornes, pour se recentrer sur sa carrière d'avocat. Mais l’arrivée de nouveaux personnages bien connus des lecteurs de comics insuffle une énergie différente : Nikki M. James campe l’assistante du procureur Kirsten McDuffie, Margarita Levieva incarne Heather Glenn (ici dans un rôle de psychothérapeute), tandis que Michael Gandolfini interprète le jeune stratège politique Daniel Blake (féru de réseaux sociaux), et Clark Johnson prête ses traits à l’enquêteur privé Cherry, ancien gradé de la police, qui a démasqué Matt sans le vouloir. Il ne faut bien entendu pas demander à Born Again de respecter la trame du très célèbre récit de Frank Miller ; il s'agit ici de quelque chose de complètement différent qui puisse dans la détestation de Wilson Fisk pour les super-héros, et qui d'ailleurs fait régulièrement référence à ce qui se passe dans les autres recoins du Marvel Universe, avec la mention d'autres encapés. Puisque nous nous contentons pour le moment de parler des trois premiers épisodes, il faut aussi mentionner la manière dont se termine le troisième. Pour beaucoup de monde l'ultime scène énigmatique est synonyme du retour du Punisher, que les Marvel Studios ont eu la bonne idée de repêcher. L'acteur (Jon Bernthal) est en effet probablement le meilleur choix possible sur le marché pour endosser le rôle de Frank Castle. Daredevil Born Again c'est aussi beaucoup de scènes de procès, beaucoup de palabres donc, avec un héros mineur (White Tiger, le Tigre blanc) qui est utilisé pour mettre en avant l'hypocrisie des justiciers urbains et démontrer à quel point Murdock peut-être un sacré avocat. Un élément tragique à prendre en compte : le décès de l'acteur qui l'interprète, Kamar de los Reyes, des suites d'un cancer quelques temps après avoir bouclé ces scènes qui assument ainsi un sens poignant. Un aspect particulièrement réussi réside également dans l’attention portée à la perspective des citoyens ordinaires, un élément souvent négligé dans la vision du monde Marvel au cinéma. Matt écoute discrètement les conversations des habitants à propos de Fisk, tandis que des segments journalistiques donnent la parole aux New-Yorkais, pour exprimer leurs avis sur leur futur maire. Le triptyque initial de cette première saison de Born Again semble donc de bonne facture et présente toute une série de promesses et d'interrogations qui devraient normalement aboutir à un nouveau face à face tendu, une nouvelle déflagration, entre Daredevil et le Caïd. Il faut signaler que ces deux derniers sont toujours aussi bien campés et qu'on aurait difficilement pu rêver mieux sur le petit écran. Charlie Cox est une fois encore extraordinaire avec sa manière d'être toujours aux aguets, d'évoluer avec discrétion et charisme, tandis que la fureur rentrée, la menace constante, l'explosion silencieuse qui caractérise le Kingpin/D'Onofrio n'ont jamais été aussi bien évoquées. Bonne pioche jusque-là, reste maintenant à attendre la confirmation dans les prochaines semaines. Même le générique, où des représentations iconiques se désagrègent sur la musique inquiétante composée par John Andrew Grush et Taylor Newton Stewart (The Newton Brothers), annonce d’emblée qu’il s’agit d’une œuvre différente mais respectueuse de ce que nous avions vu sur Netflix. Une digne suite, une suite digne, la différence est subtile, mais pour le moment, ça fonctionne.



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