WARLOCK & LES GARDIENS DE L'INFINI : L'INTÉGRALE 1992-1993


 Adam Warlock a arraché les gemmes du pouvoir à Thanos, et ce faisant, il est devenu l'être suprême de notre univers. Un tel pouvoir ne sied pas à un simple mortel (même fabriqué artificiellement dans un laboratoire d'avant garde) et il est vite convoqué par l'assemblée des principales déités cosmiques, afin de restituer les gemmes. Mais Adam n'a pas l'intention de céder au chantage, et c'est lui qui décide avec qui partager ses incroyables facultés. Le groupe qu'il va mettre sur pieds est constitué de personnages mineurs, mais tous aussi succulents les uns que les autres : Drax et Dragon-Lune (cette dernière est sa fille, et elle a autrefois dû tuer son géniteur, qui fort heureusement ne se rappelle de rien, puisqu'il est devenu une brute sans cervelle), Pip (un troll dévoyé) et Gamora (la femme la plus dangereuse de l'univers), et encore un autre "gardien" mystérieux dont l'identité était de prime abord à découvrir dans les premiers épisodes. C'est l'incapacité potentielle de ces individus à être à la hauteur de leur tâche, et les relations humaines conflictuelles qui en découlent, qui font le sel de cette série agréable et chargée en nostalgie. Publiée à l'origine dans le mensuel Titans, nous étions toujours en attente d'une publication librairie française, jusqu'à cet été, de Warlock and the Infinity Watch. Les dessinateurs se succèdent malheureusement trop vite, et le style varie beaucoup d'un épisode à l'autre. Ainsi, la transition entre le tout premier (Angel Medina, très appliqué et au trait détaillé) et l'artiste suivant (Rick Leonardi, beaucoup plus personnel et clivant, même si excellent) est sous l'enseigne d'une variation radicale du style et de l'ambiance. Pourtant, on ne boude pas notre plaisir coupable.  


Adam Warlock n'est pas non plus réputé pour sa stabilité mentale, et d'ailleurs, dès le premier épisode, Jim Starlin nous présente un messie sur le point d'être déchu, convoqué devant une cour cosmique impressionnante, une audience demandée par Eternité lui-même, avant un jugement qui sera rendu par le Tribunal Vivant. Des pages inoubliables, avec des figures du panthéon cosmique Marvel qui ont laissé une empreinte indélébile chez tous les lecteurs qui ont connu cela en temps réel. La carrière de Warlock y est brièvement résumée et de toute façon, dès les épisodes suivants, il est question de Contre-Terre, de l'Homme Bête et du Maître de l'évolution. Des personnages qui viennent à rappeler combien Adam est en réalité ce qui ressemble le plus à la figure du Christ dans les comics Marvel. D'ailleurs, son parcours éditorial est composé de morts et de résurrections et ses attitudes, son discours, sont parfois les copies carbone de ceux du Christ. Toute cette joyeuse bande va finalement trouver refuge chez l'Homme Taupe (dans l'île aux Monstres), un autre de ces éternels incompris et malheureux, qui petit à petit semble passer du statut de maître des lieux à simple vassal, prix également dans la toile des machinations de Warlock. Comme déjà évoqué, un des fils narratifs les plus savoureux est probablement la crainte que ressent Dragon-Lune envers Drax; si celui-ci vient à recouvrer la mémoire et se rappelle la manière dont il est mort précédemment, et qui il est en réalité, il y a fort à parier qu'elle serait écrabouillée en quelques instants. Parmi les dessinateurs de la série, notons également Tom Raney. Celui-ci a tendance à développer des figures très souples, avec parfois des membres qui s'étirent comme des ballons de baudruche, mais j'ai toujours été attiré par l'effet final et l'impact de ses planches, que je trouvais à l'époque du plus bel effet. Avec le recul, les goûts évoluent, mais il reste tout de même un point de repère important pour le titre dont nous parlons aujourd'hui. Concrètement, ces épisodes sont donc directement consécutifs à ce que nous appelions alors le Défi de Thanos, c'est-à-dire Infinity Gauntlet, et c'est un plaisir réel de les voir éditer sous cette forme. À ceux qui en doutaient encore, nous vivons tout de même une époque formidable pour les propositions comics en librairie, entre nouveautés à jet continu et publications vintage de la sorte. Si vous avez comme moi la quarantaine, je sais que vous allez vous laisser tenter.

(Sortie cette semaine)





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