INFERNO : JONATHAN HICKMAN BOUCLE SES VALISES


 Inferno. Pour les lecteurs les plus anciens, la référence est évidente, c'est-à-dire une des sagas mutantes les plus célèbres des années 1980, avec des démons venus d'un autre plan d'existence qui envahissent New York. Sans oublier la Goblin Queen qui fait des siennes! Pour les autres, rien de grave, car il s'agit ici d'un récit totalement différent, qui vient  apporter une conclusion à la prestation de Jonathan Hickman sur les X-Men. Plutôt que le mot prestation, il serait bon de dire révolution, tant le scénariste a su chambouler l'ordre établi pour proposer quelque chose de fort différent de ce qui existait avant lui. Alors bien sûr, cette mini série en quatre parties publiée d'un coup dans un softcover d'une épaisseur remarquable ne sera pas accessible à celui qui n'a absolument rien lu ces dernières années. Par contre, si vous vous êtes contentés des tout débuts, c'est-à-dire House of X / Powers of X, vous aurez tout de même un point de vue global et satisfaisant sur la situation, d'autant plus que Hickman vous apportera les éléments qui vous manquent au fur et à mesure, même si de façon parcellaire. Les faits les plus importants sont les suivants : les mutants sont établis sur l'île de Krakoa et forment une nation capable de damer le pion au grand pays de ce monde. Ils ont trouvé un moyen de contourner la mort et à chaque fois que l'un d'entre eux connaît une fin tragique, il revient très vite sur scène, dans un nouveau corps qui conserve les souvenirs et la personnalité de celui qui est tombé au champ de bataille. Si tout n'est pas parfait, néanmoins nous sommes loin des X-Men traqués et en déroute que nous avons lus souvent, auparavant. Il y a toutefois une condition importante à tout cela : qu'aucun mutant doté du pouvoir de lire l'avenir ne puisse se balader sur Krakoa, encore moins Destiny, qui dans une vie précédente a chassé et brûlé (avec  sa compagne Mystique) la généticienne Moïra MacTaggert, qui est désormais une mutante au pouvoir bien particulier. Elle aussi peut renaître si elle meurt, mais à chaque fois, c'est l'existence tout entière qui disparaît, puis reprend, réécrite, alors qu'elle garde les souvenirs de ses expériences précédentes. Tout ceci compose le substrat nécessaire pour aborder Inferno avec profit.



Ce sont donc les secrets et la petite cuisine interne dans le gouvernement mutant qui vont provoquer les failles menaçant l'édifice tout entier. Moira, Magneto mais aussi le Professeur Xavier, un triumvirat qui va devoir faire entrer dans l'équation un quatrième personnage très important en la personne d'Emma Frost. Mais voilà, la Reine Blanche n'est pas du genre à accepter qu'on se joue d'elle pendant si longtemps, avant finalement qu'on la mette dans la confidence, quand il n'y a plus grand chose d'autre à faire. Ce n'est pas exagéré de dire que nous passons à deux doigts d'un cataclysme majeur, qui aurait pu réécrire l'histoire entière des X-Men. Au lieu de cela, Jonathan Hickman laisse bien entendu à son successeur le soin de compléter l'édifice, qui dispose donc de fondations solides et d'un lectorat renouvelé, globalement séduit par tout ce qui a été fait durant ces trois dernières années. En fait, cette mini série vient se rattacher directement aux attentes qui étaient celles que nous avions tous au départ, c'est-à-dire les relations politiques et économiques qui unissent ou séparent Krakoa et le reste du monde, ainsi que les différentes lignes narratives (ou de réalité) causées par les différentes existences de la généticienne McTaggert. Tout ceci n'avait jamais finalement été affronté de manière aussi directe et il fallait alors attendre ce final, pour qu'enfin nous ayons les idées un peu plus claires concernant la grande tapisserie d'un scénariste exigeant. Le dessin est remarquable et associe Stefano Caselli, Valerio Schiti et R.B Silva, avec quelques planches ou situations qui sont extraites des tout premiers moments de HoX/PoX, dont nous avons déjà parlé dans la première partie de cette critique. On appréciera le rythme et le rendu visuel de ces quatre épisodes, qui passent régulièrement d'une situation à l'autre, de Krakoa à l'incursion de Magneto et de Xavier dans la base de Nemrod, tout comme nous apprécions le retour sur scène de Destiny, visiblement rajeunie, qui peut désormais reprendre le fil de son histoire sentimentale avec Mystique, sur des bases aussi romantiques que dramatiques. Encore quelque chose de réjouissant, le rôle que joue Cypher alias Doug Ramsay dans cette histoire; lui qui au départ était un mutant assez inoffensif, dont le seul pouvoir était de comprendre et pratiquer tous les langages du monde, se retrouve désormais au centre de l'échiquier, capable de prendre des décisions et de mûrir une réflexion qui n'a rien à envier à celle de Machiavel. Mais un Machiavel porté par le bien et l'utilité publique. Un personnage qui protège donc l'éthique de mutants qui ces temps derniers ont découvert que pour atteindre la plénitude de leur potentiel, puis conserver un havre de paix, ils pouvaient bien mettre de côté la morale, au profit d'une organisation non pas immorale, mais amorale, c'est-à-dire se plaçant en marge de ce que l'on attend d'eux, avec l'assurance que lorsqu'on possède de tels pouvoirs et une telle technologie, l'hégémonie est un défaut mineur pour interpréter et aborder le monde. X-Men rules! 






PRIMORDIAL : L'ODYSSÉE DES ANIMAUX DANS L'ESPACE DE LEMIRE ET SORRENTINO


 Puisqu'à nouveau les tensions entre les Etats-Unis et la Russie rythment notre quotidien, quoi de plus pertinent que de replonger dans la bonne vieille époque de la guerre froide, ou pour être plus précis, la course à l'espace? Dans les années 1950, les animaux servent déjà de cobayes, y compris pour ce qui est des mystères de la conquête spatiale. Là où il serait trop dangereux et encore incertain d'envoyer des hommes, une chienne ou des primates peuvent parfaitement faire l'affaire. Petit retour en arrière et récapitulatif pour ceux qui n'aiment pas l'histoire : En 1957, l'Union soviétique a lancé la fusée Spoutnik 2. À l'intérieur se trouvait Laika, la célèbre chienne, qui est devenue ainsi le premier être terrestre vivant à orbiter autour de la Terre. Malheureusement, le voyage de Laika n'est pas des plus transparents ni des plus déontologiques, comme le prouve le traitement cavalier qu'elle a reçu pendant le processus de préparation et, surtout, sa mort rapide après le lancement de Spoutnik 2. En 1959, ce sont cette fois les États-Unis qui lancent leur dernière fusée en date dans l'espace. À l'intérieur se trouvent deux singes nommés Able et Baker. Une fois encore, les animaux maltraités sont également morts dès qu'ils ont atteint l'espace. Ou tout du moins, c'est ce qu'on nous a raconté jusqu'ici. Car il y a ceux qui remettent en question la version officielle de l'histoire. En pleine guerre froide, alors que la course à l'espace entre les États-Unis et l'URSS devient de plus en plus cruciale, cela peut sembler assez étrange et inattendu que les deux principales puissances mondiales décident d'arrêter complètement leurs programmes spatiaux, du jour au lendemain. Beaucoup de temps et d'argent avaient été investis; il n'y avait aucune raison impérieuse de fermer les robinets. Et si quelque chose de grave, de déconcertant, qu'il vaudrait mieux cacher à l'opinion publique, avait fortement influencé cette décision? Amis complotistes, vous avez une heure pour répondre. Jeff Lemire emploie de son côté six épisodes pour donner sa version. Tout commence avec un flashback, et l'entrée en scène d'un certain professeur Donald Pembrook. Bardé de diplômes, le type est heureux d'être convoqué pour examiner les archives de la conquête spatiale. Il entrevoit alors un tournant dans sa carrière. Sauf que ce qu'on attend de lui, c'est juste de faire "le ménage" pour ne conserver que les outils éventuellement recyclables pour le gouvernement américain. La grosse désillusion. 


Au milieu de tant de documents inutiles, Pembrook trouve quelque chose qui retient son attention : c'est une disquette. Un enregistrement des signes vitaux des singes qui ont été envoyés dans l'espace. Le gouvernement américain a signalé à l'époque que les deux animaux étaient morts peu de temps après le lancement. Clairement, Pembrook n'est pas d'accord avec ce qu'il découvre : selon ces relevés scientifiques, les singes étaient encore vivants lorsque le vaisseau est entré en orbite. Le chercheur décide de passer quelques appels pour rapporter ce qu'il a découvert, mais ces coups de fil, loin de résoudre quoi que ce soit, ne font que soulever encore plus de questions. Le lendemain, alors que Pembrook se trouve devant l'immeuble où il travaille, un homme à l'allure mystérieuse s'approche de lui et lui demande de monter dans une voiture… un enlèvement en bonne et due forme, qui va l'amener à rencontrer une ancienne collaboratrice russe du projet Laika, qui s'était alors occupée avec amour de la malheureuse chienne perdue dans l'espace. Tous les deux vont devenir des cibles, car même s'ils en savent peu, c'est déjà beaucoup trop pour les services secrets et leurs objectifs de discrétion absolue. Pendant ce temps-là, le lecteur ébahi se rend compte que nos trois animaux sont bel et bien vivants, qu'ils ont acquis une forme de conscience inédite, qui leur permet de communiquer, et qu'ils cherchent le moyen de… rentrer sur Terre! Avec des influences assumées (au niveau de l'esthétique) comme 2001 : l'Odyssée de l'espace, Lemire et Sorrentino nous conduisent par la main à travers une œuvre de grande et de petite envergure à la fois. Il y a de grands concepts, des idées qui pourraient bien passer au dessus de la tête de pas mal de lecteurs, qui jouent avec notre compréhension de l'espace et du temps. Mais rien ne se superpose jamais à ce qui fait vraiment évoluer l'intrigue : son noyau émotionnel. Quelque chose d'aussi simple que les liens forts qui peuvent unir un chien et son maître. L'universel au service de l'intime. Des existences insignifiantes au service d'un album qui aborde l'immensité infinie de la réalité. Andrea Sorrentino nous séduit une fois de plus avec un travail exceptionnel. Des compositions de pages originales, une narration dynamique et un style très personnel; une fois de plus on remarque à quel point Lemire et lui se complètent à merveille. La capacité de l'italien à mélanger espionnage et science-fiction, dans une synthèse visuelle cohérente, est admirable et la lisibilité est toujours notable, même quand l'artiste tend à l'abstraction.  Mentionnons également la couleur du sensationnel Dave Stewart, qui permet à Sorrentino d'atteindre son potentiel maximum. Urban Comics nous fait le plaisir de publier Primordial dans un format oversized qui fait que nous profitons au mieux de cette beauté, qui à défaut d'apporter toutes les réponses, nous plonge dans les limbes délicieuses du mystère conceptuel de la réalité, et probablement, de la création artistique. 




BLACK ADAM : ANATOMIE DU DERNIER FILM DC/WARNER


 Une fois n'est pas coutume, commençons notre critique de Black Adam par une adresse toute particulière aux lycéens, qui vont trouver en exergue à notre discours un petit florilège d'adjectifs bien pratiques pour acquérir du vocabulaire, et à replacer, à l'occasion, dans une future dissertation. Black Adam (le long métrage) est inepte, inconséquent, nicodème (pardon à ceux qui portent encore ce prénom) ou encore gourdiflot. Pour faire court, il ne brille pas par son intelligence. Certes, ce n'est pas non plus ce qu'on lui demandait, à la base. Il s'agit là d'un bon gros blockbuster à l'américaine, pour lequel on été investis presque 200 millions de dollars, et dont la génèse s'étale sur une bonne décennie, entre hésitations compréhensibles et insistance douteuse. Black Adam, c'est la rupture avec le super héroïsme de papa, le côté boy-scout des défenseurs de l'ordre et de la justice; un type quasi invulnérable dont la colère et la vengeance sont des carburants de premier choix, jamais taris. Qui plus est, celui qu'on nommait autrefois Teth-Adam n'a rien du modèle américain traditionnel, et sa patrie est le Kahndaq, une version fantasmée de l'Egypte, l'Iraq ou de la Palestine, qui une fois portée au cinéma souffre d'une inconséquence coupable. Ce petit territoire impossible à situer sur une carte géographique est aux mains d'une bande de malfaiteurs high-tech, Intergang, une mafia 2.0 qui contrôle les points d'accès, les ressources naturelles, et la sécurité intérieure. Apparemment, le Kahndaq ne possède pas de gouvernement (c'est assez étrange), pas de police, ni même de religion officielle. Sur ce dernier point, on laisse planer un énorme flou, qui est aussi une manière d'éviter de traverser en terrain miné, ou si vous préférez d'éluder, faute de bonnes idées. Ceci étant dit, la région possède sa propre légende, celle d'un esclave qui a su insuffler l'espoir en des jours meilleurs, il y a plusieurs millénaires de cela. Un type qui a été investi de pouvoirs surhumains, sur le même modèle que Shazam, par les mêmes sorciers généreux (c'est du moins la version officielle), et qui s'en est servi pour faire le ménage à sa manière, c'est à dire en jetant l'eau du bain et le bébé par la même occasion. C'est que celui qui fut Teth-Adam n'avait rien d'un pacifiste. Issu d'un peuple réduit en esclavage, il a vu sa famille souffrir puis périr, et il en a conçu comme une certaine acrimonie, qui l'a poussé à perdre un tantinet son calme légendaire. Puni pour sa véhémence, le surhomme a été emprisonné, avant d'être réveillé en 2022 par une archéologue imprudente, à la recherche d'une couronne mystique. Tout ceci nous est expliqué dans les premières minutes, par un texte récité très didactique, la version National Geography de DC Comics, truffé d'ésotérismes bon marché qui fleurent bon le grand n'importe quoi, pourvu qu'on en arrive à la conclusion inévitable, c'est à dire Dwayne Johnson dans son costume, furibard. 




Black Adam, c'est aussi (surtout, pour beaucoup d'entre vous) la Société de Justice. D'Amérique, convient-il d'ajouter. Ou tout du moins, une version de poche, exportable en territoires ennemis, dans la plus grande discrétion. Exit le groupe dont la vocation est de former une grande famille, et où les générations se succèdent dans le respect, la tradition et la transmission. Place à quatre aventuriers mandatés par une Amanda Waller réduite à l'état d'apparitions furtives sur un écran, qui obéissent servilement, à grand renfort de sortilèges et de coups de tatane. Hawkman assure la partie logistique et la distribution de testostérone, sans qu'il soit possible de bien cerner de quel Hawkman il s'agit, quand on est lecteur de comic books (en gros, c'est dans le film une caricature de Tony Stark avec des ailes, qui aurait fait de la salle et soulevé de la fonte pendant des mois, tout en respectant les impératifs du casting, c'est à dire donner de l'espace aux "minorités visibles"). Son ami et probable mentor est le Docteur Fate, qui use et abuse de tours de passe-passe déjà présentés dans Doctor Strange in the Multiverse of Madness, incarné par un Pierce Brosnan gentil papy énigmatique. Les autres invités sont des novices, recrutés en intérim, et peinent à trouver de la place dans un scénario qui leur réserve uniquement des instants d'humour décalé (Atom Smasher est un gentil benêt un peu gauche, clairement dépassé. Vous avez dit Ant-Man in reverse?) ou de poésie visuelle stérile mais agréable à regarder (l'explosion multicolore des pouvoirs de Cyclone, elle aussi passée à la moulinette des nouveaux standards consensuels, en matière de représentation). Nous frémissions déjà : une équipe américaine intervient au Moyen-Orient, dans un contexte explosif, pour capturer une sorte de dieu irascible qui entend incarner la soif de justice de tout un peuple opprimé? Mais c'est une vraie épopée géopolitique, un pamphlet anticapitaliste et impérialiste, un drame social, qui est sur le point de nous être offert! Nous n'en demandions pas temps, merci Warner, merci DC. Sauf que Jaume Collet-Serra n'en a rien à faire de tout cela, du matériau brut qui lui est confié pour l'occasion. Avec lui, la Justice Society ce sont quatre soldats un poil bourrins qui incarnent l'ordre et l'autorité, qui sont prêts à casser trois douzaines d'œufs pour faire une omelette pour deux personnes. Les libertés individuelles et les subtilités des us et coutumes de ceux et ce qui se dressent sur leur chemin? Au cachot, l'Amérique et la paix dans le monde le valent bien! Et puis c'est un blockbuster pour adolescents qu'on nous inflige là, nul besoin d'ambitionner un ours d'or à Berlin. Tout penauds, nous regardons la montre… encore quatre-vingt dix minutes de film à torcher, et deux gros paragraphes pour ce qui est de notre critique de l'extrême. 




Arrêtons-nous quelques instants sur l'acteur principal de ce film, à savoir Dwayne Johnson. Ancien catcheur et lutteur, il a tenté de porter le projet à bout de bras, qu'il possède particulièrement musclé. Taillé comme un tronc de séquoia, sculpté dans la fonte, il a tout pour incarner un super bourrin sur grand écran, capable de résoudre l'intégralité des problèmes de la planète avec une paire de bourre-pif bien assénés. Certains pourront lui reprocher un manque d'expressivité mais le Black Adam que nous avons devant les yeux n'a rien d'un philosophe des Lumières. Il n'est pas là pour deviser sur l'injustice sociale ou l'inexorabilité du temps qui passe, mais pour exprimer sa colère et sa frustration, de la manière la plus élémentaire qui soit, c'est-à-dire avec ses poings. En fait, je vais être honnête et vous dire que je le trouve bon dans ce rôle; c'est d'ailleurs probablement un des points forts du film, si on se donne la peine de gratter en profondeur pour en découvrir. Clairement, notre Adam Noir est loin d'être un super-héros, mais il est complètement impossible de voir en lui un super méchant. Déjà parce que son histoire familiale n'est pas des plus heureuses et qu'elle aurait de quoi titiller le plus calme des moines tibétains, mais en plus, l'inflexibilité et l'antipathie innées que transmet Hawkman dans ce long métrage font qu'en retour, son antagoniste apparaît comme baignant dans la bienveillance. Il faudrait être foncièrement malhonnête pour ne pas noter le charisme sculptural et la conviction tranquille que place The Rock dans cette interprétation quasi littérale, tant le héros adapté à l'écran semble en réalité le prolongement de l'identité de son acteur, qui même en fronçant les sourcils ne se résume jamais à un bad guy en proie à une furie homicide. Quelques touches drolatiques finissent même par se transformer en un running gag naïf mais qui peut prêter à sourire (la recherche d'une punchline, d'un slogan à réserver aux ennemis vaincus, mais qu'il ne parvient pas à placer au bon moment, dans le bon contexte) le devoir sacré d'un justicier qui s'adapte peu à peu aux méthodes et à la philosophie d'un siècle qu'il découvre. Encore que cette dernière phrase pourrait être sujette à caution, tant le décalage temporel et culturel est mal exploité, avec un Black Adam qui comprend très (trop) vite ce qui se trame autour de lui. Plutôt que de dormir dans une stase magique, probablement a t-il passé ces dernières années sur Twitter à scruter les différentes tendances du réseau asocial par excellence? 




D'une manière générale, le film veut dégager une image sombre. Pour cela, il n'hésite pas à dérouler par moments des scènes totalement surnaturelles, voire horrifiques, entrecoupées de touches d'humour qui n'atteignent pas toujours leur cible. Ça peut-être déroutant et franchement hors sujet, comme dans la dernière partie, lorsque le spectateur découvre une horde de squelettes qui se jettent sur la population. On ne comprend pas trop en quoi ces cadavres ambulants peuvent être utiles à celui qui les convoque (gardons le silence sur ce point précis, pour ne pas spoiler le final du film), étant donné qu'il suffit d'une gifle ou d'une légère brise pour qu'ils se brisent en menus morceaux. Nous sommes au même niveau improbable, voire méprisant, que l'armada des petits Asgardiens, que Thor investit de son pouvoir pour affronter Gorr, dans le déconcertant Love and thunder. Parlons-en, alors, de la population du Kahndaq; les us et coutume locaux, les particularités des habitants, tout cela est rapidement passé à la trappe. Les jeunes font du skate, les adultes sirotent un thé à la menthe (ou une bière) en terrasse, on a plus l'impression de voir une partie de l'Upper East Side de Manhattan, hâtivement reconstituée au Moyen-Orient, qu'une vraie nation orientale ou africaine, fière de son passé et de ses traditions. Le Kahndaq est un théâtre totalement artificiel qui sert juste de prétexte pour raconter une histoire qui ne se déroule pas sur le sol américain; à aucun moment le réalisateur ne prend en considération le potentiel incroyable de ce genre de choix narratif. Si Black Adam et la Société de Justice avaient décidé de se battre comme des chiffonniers au fin fond de l'Amérique Latine ou en Lettonie, je vous assure que l'effet aurait été le même. Alors, pourquoi ce film est-il aussi important, si on écoute nombre de commentateurs? Parce qu'il s'agit des prémices du futur univers cinématographique DC, qui a enfin décidé d'apprendre de ses erreurs. C'est en ce sens qu'il fallait attendre la fameuse scène bonus, celle qui fait toute la différence entre le spectateur entré par hasard dans la salle et ceux qui savent et attendent patiemment leur petit pousse-café digestif. Et là, grande surprise, Henry Cavill nous confirme qu'il reprend du service, que Superman n'est pas très content d'apprendre que Black Adam a fait des siennes, et que vraisemblablement les deux vont se taper dessus (avant de se rabibocher devant un gros hot-dog au ketchup), ce qui nous promet un autre grand film d'une profondeur inégalée, qui sera probablement réalisé par un orfèvre du genre, comme Apichatpong Weerasethakul ou les frères Dardenne. Tout cela nous fait sourire car à l'heure où nous écrivons ces lignes, nous apprenons juste que le grand ménage a enfin été effectué dans la division cinématographique de DC, et que c'est désormais James Gunn qui hérite de la patate chaude, lui qui jusqu'ici peut présenter une copie presque sans faute, des Gardiens de la Galaxie à la dernière mouture de la Suicide Squad, sans oublier l'irrévérence loufoque de la série Peacemaker pour HBO. Certes, entre-temps, le type s'est fait expulsé des Marvel Studios pour avoir balancé quelques tweets poil à gratter et malaisants. Mais dans la mesure où il a particulièrement bien rebondi, soigné sa réputation et son compte en banque, et désormais pris du galon, l'impression est que pour une fois, l'erreur est du côté de la bande à Mickey. Restons donc confiant et soyons un peu bienveillant. Je ne vous déconseillerais pas de vous rendre en salle pour assister à une projection de Black Adam; après tout c'est votre argent, votre budget, et si vous souhaitez profitez de la tiédeur des salles obscures sans avoir à beaucoup réfléchir, vous pourriez même vous sentir dans votre élément. 






ULTRAMEGA : LES KAIJUS DE JAMES HARREN CHEZ DELCOURT


 Voici enfin venir chez Delcourt Ultramega, dont le titre tient autant de l'hyperbole réjouissante que du pléonasme surprenant. Derrière des créatures géantes qui ne sont pas sans rappeler des sortes de Bioman (ou mieux encore X-Or, si vous avez comme moi de bons souvenirs des années 80) se cache une série singulière écrite et dessinée par James Harren, qui récupère des idées et des concepts désormais éculés pour en faire quelque chose qui va au bout de ses idées et innove. Vous savez tous ce que sont les Kaijus, ces gros monstres japonais qui sèment la terreur lorsqu'ils apparaissent dans les grandes villes. Ici, ils sont en réalité le résultat d'une infection venue de l'espace, qui frappe aléatoirement les terriens. Pour faire face à la maladie et contrer les terribles kaijus qui dévorent tout ce qui bouge et semblent avides de destruction, une entité extraterrestre est apparue en songe à trois terriens et les a dotés de pouvoirs formidables. L'un d'entre eux devient un super technicien qui fabrique des robots pour lutter contre la menace endémique, un autre a quelques peu disparu des radars et s'est mis en retrait, le troisième (Jason) est au centre de la grande première partie de notre album, puisque c'est lui qui va au charbon et fait face au chaos engendré par les kaijus. Cependant, sa propre histoire familiale finit par engendrer une menace d'un niveau encore plus puissant, qui va nécessiter l'union de tous ceux que l'on nomme les Ultramegas, dans un combat dantesque qui dépasse de très loin ce que vous avez pu lire dans le genre. En général, ça se termine toujours bien, avec des héros qui trouvent une parade en utilisant leur super pouvoirs, c'est-à-dire des coups de poing atomiques ou des inventions fantasmagoriques. Ici, attendez-vous à être choqués car ça va plutôt se terminer les tripes à l'air. Et l'artiste, déjà connu pour sa grande dextérité et son amour des ballets sanglants et gigantesques, décide de faire très fort et de ne pas ménager les effets. L'ensemble est donc percutant et risque de laisser des traces durables sur vos rétine exposées.



Après des débuts en fanfare qui dégoulinent d'hémoglobine, la seconde partie change un peu de ton et se concentre sur la société post-kaijus, des années après le terrible affrontement qui est décrit dans les 60 premières pages. L'avenir est bien sombre et les humains qui subsistent sont clairement dépendants de la société des kaijus, qui entre-temps connaît elle aussi une certaine forme de décadence. Les gros monstres d'autrefois ont désormais des dimensions beaucoup plus modestes et se repaissent de sortes de jeux du cirque modernes, organisés dans une arène appelée le Koliseum, avec un k s'il vous plaît. Si tout la partie médiane de l'album ralentit donc au niveau du rythme, les événements s'enchaînent et repartent de plus belle vers la fin, pour une conclusion provisoire qui reprend les éléments de départ, c'est-à-dire des tripes, de la baston à n'en plus finir des scènes choc. Harren semble énormément s'amuser avec cette nouvelle créature et il faut dire la vérité, la plupart du temps, il parvient à nous maintenir en éveil, non seulement avec un dessin ultra énergique, une sorte de croisement entre Mignola, Darrow et Warren-Johnson, mais aussi une histoire qui n'hésite pas à secouer les intestins du lecteur et ne ménage pas tous les protagonistes qui peuvent un instant occuper la scène. Du coup, si vous savez ce que vous allez lire, vous ne serez pas déçus; le côté récréatif et grand guignolesque de l'ensemble est très efficace, excellemment mis en images et présenté dans une édition à la hauteur par Delcourt, avec un grand format cartonné luxueux qui propose également toutes les belles variant covers à la fin. Ultramega chouette?






COPRA VOLUME 3 : LES PORTRAITS DÉCOMPOSÉS DE MICHEL FIFFE (CHEZ DELIRIUM)


 Aussi dysfonctionnelle qu'elle puisse être, la bande des joyeux drilles de Copra forme une unité dont le rôle est de mener à bien des missions qui passent en dessous le radar de tout le monde; c'est extrêmement périlleux et tous ceux qui participent ne sont que des pions à sacrifier sur l'autel d'une cause qui n'est pas forcément toujours très noble. Alors parfois, vient le besoin de souffler entre deux opérations d'importance. Chacun peut retrouver sa vie, son existence, ou tout du moins ce qui en fait office et parfois ça n'est vraiment pas grand chose. Lloyd, par exemple, doit encore composer avec la mort de son fils, qu'il n'a toujours pas digérée, et comme en plus il a de sérieuses raisons de penser qu'un autre membre du groupe porte sa part de responsabilité, le voici alors engagé dans une course vers la vengeance. Comme il le dit lui-même en fin d'épisode, il se focalise sur un petit point noir dans un océan de néant et se raccroche à ce point. Un personnage qui n'a plus de repère et qui en conséquence est capable de tout, y compris le pire. Patrick "Wir" Dale passe pour sa part le plus clair de son temps dans une armure high-tech, qui lui permet de briser ses adversaires. Mais quand il en sort, c'est un homme somme toute banal qui doit composer avec sa famille, et notamment ceux qui sèment le trouble et deviennent une menace pour la tranquillité des siens. Insensible sous sa forme mécanique, il devient par contre l'objet de passions et pulsions humaines quand il abandonne sa carapace. Et tant pis pour ceux qui n'ont pas compris qu'il y avait des limites à ne pas franchir, surtout quand il s'agit de rôder dangereusement autour de sa grand-mère. Ce volume trois s'attarde également sur le personnage de Gracie. Nous la retrouvons en Floride, sur la piste de trafiquants de drogue, mais aussi du terrorisme anti cubain. Plus encore que dans les deux premiers numéros de ce tome, il y a beaucoup d'action et de violence dans ces pages ou Michel Fiffe continue de se divertir grandement. Plus qu'un attachement atavique au réalisme des personnages, c'est sa manière de raconter l'histoire sans entrave, avec un style personnel et inédit, qui s'avère réjouissant. On trouve toujours de nouvelles petites inventions, comme par exemple l'insertion du nom des personnages sous forme d'onomatopée o d'ajouts qui se fondent dans la planche, là-même où ils apparaissent. Parfois à l'économie, sans avoir besoin du moindre trait de trop, Fiffe va droit au but, sans forcément emprunter les chemins auquel le lecteur est habitué.



Avec Guthie commencent les trois récits les plus ésotériques, qui surfent entre dimensions étrangères, métaphysique et folie furieuse. Abandonnée en piteux état dans une autre dimension, elle va devoir se refaire une santé avant de se retrouver à nouveau confrontée à ses poursuivants. Et ça ne se finira pas de la meilleure des manières. Situation également très tendue pour Rax et son gilet bien particulier, une des armes les plus formidables que quiconque n'ait jamais portée. Seulement voilà, quand on est incarcéré et sur le point d'être abandonné dans une sorte de "zone fantôme" scellée, mais aussi battu à mort par des codétenus qui profitent d'un moment de doute, quel espoir peut-il encore subsister de reprendre une vie plus ou moins normale? Une question à laquelle il n'y a pas forcément de réponse. Quant à Xenia, elle possède toujours dans son organisme ce fragment d'un casque au pouvoir incommensurable, qui fait d'elle une créature au pouvoir quasi divins. Instable et confrontée à des instincts et désirs des plus contradictoires, elle tente de sauver Vincent, la version Copra du Docteur Strange, dans un univers totalement fantasmagorique, qui permet à Michel Fiffe de lâcher prise définitivement, d'instaurer une construction des pages, une insertion des dialogues et une progression logique de l'histoire des plus dingues. C'est dans cet épisode qu'il donne la pleine mesure de ce qui constitue sa force, sa faculté de s'émanciper des canons du genre pour écrire planche après planche sa propre histoire, dans tous les sens du terme. Il est donc fort logique et pertinent que ce soit cette aventure précise qui vienne clore le volume 3 de Copra. Comme toujours un petit bijou graphique, qui derrière l'apparente simplicité des traits et des formes, recèle une inventivité et une singularité que nous avons rencontré bien peu souvent dans l'histoire du média. En fait, il s'agit d'un titre totalement à part, qui a tout autant de chance de vous rebuter que de vous faire tomber radicalement amoureux. Comme nous faisons partie de ceux qui ont eu le coup de foudre, vous pouvez deviner le plaisir évident à retrouver cette galerie de portraits qui sert un peu d'interlude ou de second départ à un monde fascinant. À retrouver chez Delirium, un éditeur qui ressemble aux créatures qu'il publie, et dont il partage les qualités.


Retrouvez notre article au sujet du 

CONCOURS : DEUX EXEMPLAIRES DE PRIMORDIAL (URBAN COMICS) à gagner !

 


Concours sur UniversComics!

En cette fin de mois d'octobre, nous remercions Urban Comics, qui met à notre disposition deux exemplaires de PRIMORDIAL, album signé Jeff Lemire et Andrea Sorrentino, un duo magnifique qu'on ne présente plus (Gideon Falls, Green Arrow...). Tirage au sort le 28 octobre. Pour jouer, rien de plus simple, vous vous rendez sur Facebook et vous suivez les instructions (ci-dessous). Si vous n'avez pas de profil FB, vous pouvez toujours nous laisser un message en commentaire, avec vos coordonnées. Bonne chance à toutes et à tous. 

1957. L'URSS envoie la chienne Laïka en orbite autour de la Terre. Deux années plus tard, les États-Unis réitèrent l'expérience avec l'envoi de deux singes, Able et Baker. Les morts successives des cobayes des missions Spoutnik 2 et Jupiter scellèrent la fin des programmes russes et américains de conquête de l'espace pour réorienter les efforts des deux empires vers l'armement. Lors du démantèlement d'un projet spatial à Cape Canaveral, un scientifique - le docteur Donald Pembrooke - met cependant la main sur un relevé qui prouverait contre toute attente que les animaux auraient survécu...

Date de sortie : 28 octobre 2022

Pagination : 176 pages

EAN : 9791026825371

Contenu vo : Primordial #1-6

Prix : 21.01 €


LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : LES PIZZLYS


 Dans le 137e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente Les pizzlys, album que l’on doit à Jérémie Moreau, édité chez Delcourt. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :

- La sortie du du premier tome de La belle espérance intitulé Le temps des fruits verts, série que l’on doit au scénario de Chantal Van den Heuvel, au dessin d’Anne Teuf et c’est édité chez Delcourt

- La sortie de l’album La chambre des merveilles, adapté d’un roman de Julien Sandrel, par Philippe Pelaez qui en signe le scénario, Patricio Delpeche le dessin et c’est édité chez Grand angle

- La sortie de l’album Le matin de Sarajevo que l’on doit au scénario de Jean-Charles Chapuzet, au dessin de Christophe Girard et c’est édité chez Glénat dans la collection 1000 feuilles

- La sortie du premier tome d’Hollywoodland, album édité chez Fluide glacial que l’on doit au scénario de Zidrou et au dessin d’Éric Maltaite

- La sortie de Marilyn dernières séances tirés du livre de Michel Schneider qu’adapte Louison au scénario et au dessin et qu’édite Futuropolis

- L’adaptation en bande dessinée du film Diabolo menthe de Diane Kurys, adaptation que l’on doit à Cathy Karsenty et c’est édité chez Dargaud



 
 

THE PLOT HOLES : FICTION TOTALE POUR SEAN MURPHY


 Il y a certains auteurs qui font que vous achetez un comic book sans même réfléchir; l'histoire, les détails, tout cela vient après. De toute manière, vous êtes certains d'avoir entre les mains quelque chose qui mérite qu'on y accorde de l'importance et un peu de temps. Parmi ces élus de la bande dessinée américaine, nous trouvons Sean Murphy, une des stars du genre. The Plot Holes, qui ressemble à sa création la plus personnelle à ce jour, s'impose comme une évidence en quelque pages seulement. Dire qu'il s'agit d'une œuvre absolument géniale est réducteur; tout d'abord, il faut bien comprendre le concept : un groupe de personnages tous issus d'un monde de fiction duquel ils ont été prélevés, par une sorte de super éditrice surnommée "Ed", qui les a choisis et formés pour devenir un groupe d'intervention, les Inco-Errants. Ces personnages fictifs, recrutés dans différents univers, ont ainsi l'habitude de s'introduire dans les récits des autres, dans l'objectif de les sauver de la contamination et donc de l'oubli, en effectuant des corrections, des retouches, puis en les publiant, lorsqu'il s'agit d'histoires qui ne l'ont pas encore été, comme si elles étaient en attente de validation par leurs éditeurs. Il y a donc un tour de passe-passe formidable dans ce sujet; celui à la fois de parler du monde de l'édition et de la création, des super-héros plus traditionnels, de la science-fiction en général, mais aussi de ce que peut représenter le processus créatif, du pouvoir que possède l'auteur sur les idées et les personnages qu'il peut inventer à tout bout de champ, sans véritablement se soucier de la manière dont ils vont ensuite vivre leur propre existence. Dis comme ça, cela pourrait sembler un peu prétentieux, mais il se trouve que tout coule de source. Première raison, Murphy a mis sur pied une bande de joyeux drilles tous aussi attachants les uns que les autres, avec une sorte de super mécanicien tiré d'un manga à la Gundam, un homme tigre métamorphe homosexuel, une créature d'énergie surpuissante à la moralité douteuse, une vampire spécialiste du maniement des lames en tout genre, un vieillard acariâtre enfermé dans un corps de pré adolescent, et pour terminer "Ed", à l'origine du groupe, qui malgré son âge avancé est une sorte de super mamie badass qui montre l'étendue de sa motivation dès la toute première planche. Et pour que l'identification du lecteur soit complète, un autre personnage entre en jeu en cours de route, un auteur de comic books (Cliff Inkslayer) qui vient de perdre sa femme, en plein doute existentiel, et qui dans un premier temps semble dépassé par les événements, avant de corriger le tir.



Cette histoire est donc une déclaration d'humour à l'acte de création en soi. Avec la capacité de faire le grand écart entre différents univers, ce que l'on pourrait appeler aussi la littérature de genre. On plonge d'un manga à une reconstitution historique (avec les doutes de George Washington lui-même) en passant par le western, Robin des Bois, et même à un moment donné un clin d'œil fort sympathique et autoréférencié avec une vignette tirée du monde du Punk Rock Jesus de Sean Murphy lui-même. Ce dernier est en très grande forme et le dessin est à la hauteur de la réputation d'un artiste qui est aujourd'hui devenu incontournable pour les amateurs de comics. Si certains choix de narration produisent quelques planches un peu plus simplistes et donc "faciles" dans les deux derniers épisodes, la plupart du temps il est en état de grâce et à la hauteur de ce pourquoi on l'adore, c'est-à-dire ce croisement très particulier entre différents styles, pour un résultat survitaminé et presque unique (je dis presque car dernièrement Matteo Scalera parvient à produire des choses qui sont sur le point de dépasser le maître). Le rythme est endiablé et les rebondissements se succèdent à une vitesse telle que les cinq épisodes qui constituent The Plot Holes auraient très bien pu faire l'objet d'une maxi série beaucoup plus longue. Tous les personnages sont très bien campés, et celle qui est censée être le cœur pulsant du groupe de héros, c'est-à-dire l'éditrice, est également un hommage à la grand-mère de Murphy. Notons aussi que les dialogues sont particulièrement savoureux; il y a de très nombreuses touches d'humour et l'envie permanente de plaisanter avec le politiquement correct qui domine aujourd'hui toute forme de communication, grâce au personnages le plus petit, Kevin, un garçonnet de 8 ans qui est en fait un vieux briscard de 65, enfermé dans le corps du protagoniste d'un comic strip pour enfants. Urban comics nous offre aussi une belle galerie de bonus avec les croquis préparatoires pour la série, un peu de storyboards et de belles couvertures. Voici le genre d'album qui devrait plaire au plus grand nombre, tant il semble difficile de ne pas adhérer à cette centaine de pages adrénaliniques et bien dans le ton de l'univers de Sean Murphy. Sortie cette semaine!




LA BELGICA TOME 2 : LA MÉLODIE DES GLACES CHEZ ANSPACH


 L'aventure et le merveilleux, ça peut être voir de près, pour la première fois, des manchots. Un instant de poésie pour Jean, qui s'est embarqué à bord de la Belgica, destination l'Antarctique, où malheureusement le navire va être bloqué dans les glaces pendant plus d'un an, pour une expérience humaine aussi fascinante que terrifiante. Pendant ce temps-là, il suffit de jeter un œil à la couverture du second et dernier tome de l'histoire écrite par Toni Bruno pour constater que Elke, sa promise, est restée en arrière en Belgique, à observer par la fenêtre les navires qui partent, avec pour seuls compagnons le fardeau de ses souvenirs et une mélancolie pressante, qui peine à partir. Et du coup, si le jeune homme a pris le chemin de la mer et des destinations exotiques, la jeune femme va peu à peu prendre conscience du statut peu glorieux des femmes, et organiser la défense de la gente féminine, régulièrement exploitée, spoliée ou humiliée en société, dans ses relations personnelles et professionnelles. Les deux personnages ont grandi en l'espace de quelques mois et ils sont devenus quelque chose d'autre; bien plus présents à leurs situations actuelles respectives, comme Jean qui n'est plus ce matelot novice embarqué malgré lui dans quelque chose qui le dépasse, mais désormais quelqu'un dont le courage et le sens des responsabilités s'avèrent précieux pour le commandant de la Belgica, lorsqu'il surprend un début de mutinerie, sur le point d'éclater. Elke, elle, se rend compte qu'il est possible d'apporter un peu plus d'égalité dans les rapports entre hommes et femmes et s'engage corps et âme dans la ligue pour les droits de la femme. Le capitalisme et la révolution industrielle nécessitent un réel investissement civil et politique, et elle aura l'occasion de démontrer qu'elle est capable d'autre chose que de se désespérer, en vain.



Tandis que la Belgica est prisonnière des glaces et qu'une sinistre dynamique se met en place parmi les membres de l'équipage, qui sont peu à peu victimes de leurs démons personnels, du découragement, mais aussi de la maladie comme le scorbut, qui ne manque pas de les harceler, Elke va de l'avant et évolue. Si elle devient une égérie de la lutte sociale, elle reste toutefois fidèle au souvenir de celle qu'elle aime, et chaque opportunité de renouer avec une vie sentimentale se solde par une hésitation fatale ou un petit signe du destin, qui repousse encore davantage le moment où elle s'ouvrira à nouveau à la vie. Toni Bruno n'a pas besoin de beaucoup pour faire comprendre au lecteur ce qui est en train de se jouer et ce que ressentent ses personnages; avec un minimum d'effets, parfois quelques traits simplement, il est en mesure de nous faire ressentir les émotions des uns et des autres. Par endroits, il n'utilise pas même de dialogue, tant ceci semble superflu, comme par exemple -et cela va de soi-  il nous donne à voir l'amitié entre Jean et le chien Sno, qui l'accompagne dans son périple sur la glace. Le travail de l'artiste est exceptionnel car il s'agit à la fois d'une recherche artistique de premier ordre, avec notamment l'emploi d'une encre d'autrefois, qui donne un cachet certain à l'histoire, qui baigne dans un gris verdâtre mélancolique et très efficace, mais aussi une recherche historique, puisque nous sommes ici devant des faits réels dans lesquelles ont été insufflés des éléments de fiction, dont le principal est bien entendu le personnage de Jean. Que ce soit l'expédition de la Belgica (à la toute fin du dix-neuvième siècle) ou le moment crucial où les droits des femmes ont commencé à évoluer en Belgique, tout est traité avec beaucoup de pertinence et les fils narratifs n'ont de cesse de se croiser, pour former au final un roman à deux voix, qui se laisse dévorer. La Belgica est une histoire vibrante et parfaitement mise en scène et elle bénéficie en outre de bonus notables. Dans le tome 2, c'est au tour du courrier de Jean, adressé à sa fiancée, et des portraits des différents membres de l'expédition, qui sont par ailleurs un peu plus mis en avant dans ces pages, à commencer par le cuisinier Louis Michotte ou le Docteur Cook, qui ont chacun leurs scènes de bravoure, ou dirais-je leur quart d'heure de célébrité. Une lecture particulièrement recommandée pour ceux qui aiment l'aventure et l'histoire, intimement mêlées, disponible chez Anspach Editions.  


Pour tout savoir de cette série, et du tome 1, je vous invite à lire ou télécharger notre numéro du mois de septembre 2021. UniversComics Le Mag' #15, qui plaçait cet ouvrage dans son preview du mois. Disponible ici




AMAZING SPIDER-MAN: MAXIMUM CARNAGE (MARVEL EPIC COLLECTION)

 


Les volumes de la Epic Collection que propose Panini fonctionnent exactement comme ceux publiés par Marvel aux Etats-Unis. Bref, il ne faut pas s'attarder sur une quelconque séquence chronologique, mais aller picorer dans l'histoire éditoriale des séries proposées, pour enfin reconstituer une frise complète, des origines aux années 1990, au bout de plusieurs années. Ce mois d'octobre, c'est au tour de Maximum Carnage, crossover sanglant pour Spidey, d'être à l'honneur. Dans les années folles des comics (les nineties), Venom est un des personnages phares de l'univers Marvel : le symbiote extraterrestre, poussé par la haine et le ressentiment envers Peter Parker, a trouvé un acolyte idéal en la personne de l'ancien journaliste Eddie Brock. Celui-ci retient Parker responsable de sa déchéance professionnelle. Ensemble ils deviennent une sorte de monstre ou croque-mitaine protéiforme. Il connaît l'identité secrète de Spider-Man et ne déclenche pas son sens d'araignée, c'est en quelque sorte l'ennemi ultime. Mais peu à peu, poussé par le succès auprès des lecteurs, le personnage se transforme en un véritable anti-héros, motivé par une conception toute personnelle de la justice et de la protection des innocents. Le curseur se déplace et la nouvelle créature maléfique, le nouveau mal absolu, devient Carnage. Il s'agit du rejeton du symbiote précédent, et il s'est associé avec Cletus Kasady, un sociopathe de la pire espèce, complètement incurable. Le costume est rouge sang, et sa façon d'agir est simple : le chaos et les meurtres en permanence. Lorsque Carnage est maîtrisé et emprisonné dans l'asile de Ravencroft (une sorte de Arkham à la Marvel), on pourrait penser que son parcours est momentanément terminé, mais comme le veut la tradition des comics, s'il est enfermé, c'est pour mieux s'échapper! Non sans bien sûr laisser derrière lui une trace de sang et des morts à la pelle. Pour contrer cet ennemi particulièrement violent, Spider-Man va pouvoir compter sur toute une série d'alliés, et il va même temporairement faire équipe avec Venom. Il s'agit d'un crossover très marqué par l'esprit de son temps (1993) où coule hémoglobine à flots, et qui concerne toutes les séries du tisseur de toile.



Carnage n'est pas seul. Lui s'est trouvé une copine psychotique quasiment tout aussi cinglée, et qui répond au nom de Shriek. Le couple dément bénéficie en outre d'une sorte d'enfant putatif, ou plutôt d'animal de compagnie, le doppelganger, à savoir un double difforme de Spider-Man, qui remonte au crossover The Infinity War. Mais notre histoire ultra violente présente d'autres super-vilains, qui font leur apparition, comme par exemple Carrion ou le Demogoblin. En face, il faut alors une véritable armada pour contrer tous les cinglés qui mettent la ville à feu et à sang. Beaucoup de personnages qui gravitent habituellement dans l'orbite du monde du Tisseur vont prêter main-forte, comme la Cape et l'Epée, Morbius, Black Cat, ou bien d'autres un peu plus inattendus comme Captain America, Firestar et  Deathlock. Quand il y a plusieurs séries concernées, nous trouvons logiquement une liste  imposante d'artistes au menu. Dans ce  Maximum Carnage, au scénario, défilent par exemple Tom De Falco, David Michelinie, ou le spécialiste de la psychologie fouillée et torturée, Jean-Marc De Matteis, qui s'occupent tous de rendre la vie impossible à Spider-Man.  Côté dessinateurs j'apprécie tout particulièrement Sal Buscema et son trait rigoureux, qui à l'époque a marqué profondément la série Spectacular Spider-Man, où il est resté de nombreuses années durant en poste. Mais nous trouvons aussi Mark Bagley, qui officie depuis des lustres sur le personnage, ou encore Alex Saviuk, dont le style est beaucoup moins gracieux que ses collègues. Mentionnons également le regretté Tom Lyle, qui bénéficie d'un encrage lourd et d'une mise en couleur parfois criarde, ce qui fait que ses planches sont plus surchargées et moins lisibles que les autres. Nous avons là 14 épisodes qui ont marqué leur époque, et qui constituent un tournant dans l'histoire de Spider-Man, puisque il s'agit d'un plongeon angoissant dans une violence irréfrénable, une tentative évidente d'adapter les aventures de Spidey aux années 90. Globalement cela fonctionne bien si on regarde l'ensemble avec l'œil  nostalgique du lecteur que nous étions alors, mais il est vrai qu'avec le temps, cette avalanche de baston et de crimes n'apparaît pas comme le point culminant de la décennie pour le monte-en-l'air. Récréatif et bourrin, le genre de lectures dont on nous a abreuvés durant une décennie dingue. 



SILVER SURFER RENAISSANCE : ON REPLONGE DANS LES 1990s?


 C'est un temps que les novices ne connaissent pas, une période où l'univers cosmique Marvel se reposait sur les épaules d'un géant comme Jim Starlin. Les années 1990 ont été marquées par plusieurs histoires hautement symboliques, qui ont d'ailleurs fini par donner naissance au plus grand film de super-héros de tous les temps sur grand écran (Infinity War). Nous parlons là d'Infinity Gauntlet, c'est-à-dire le défi de Thanos, incontournable jalon Marvel. Starlin ne pouvant tout faire tout seul, il avait l'habitude de se reposer sur quelques hommes de confiance, dont Ron Marz, un autre des grands architectes des sagas de l'espace, connu aussi chez la distinguée concurrence, pour être l'homme qui a créé le Green Lantern Kyle Rayner. Du côté des dessinateurs, l'époque était à un certain Ron Lim. Toujours appliqué, son trait ultra lisible et reconnaissable, tout en rondeur, a fait la joie de nombreux lecteurs. Sa prestation sur la série Silver Surfer reste à ce jour le sommet de sa carrière. Tout ceci est d'actualité aujourd'hui, puisque Panini propose une mini-série inédite en 5 volets, qui rassemble les deux "Ron" et nous replonge directement dans les événements de l'époque que je viens d'évoquer, à une période indéfinie de l'histoire, mais qui ramène sur le devant de la scène tous ceux qui étaient alors les stars des mensuels cosmiques. Forcément, les anciens se réjouissent à l'avance. Je veux dire, ils sont tous là, Thanos bien entendu, mais aussi le Valet de cœur, le fils du Captaine Marvel originel (Genis-Vell) et même un certain Tyrant, qui fut autrefois un des hérauts de Galactus et qui avait eu droit à quelques épisodes hauts en couleur et dramatiques, dans la série du Surfeur d'Argent, au temps où elle était publiée en petit format dans Nova. Vous avez dit nostalgie ?



Bien entendu, puisqu'il est question de tout ce que je viens de citer, il sera aussi fait mention des gemmes du pouvoir, notamment celle de la réalité, qui a été confiée à Thanos à l'insu de tous, par Adam Warlock. Le hasard faisant bien les choses, vous avez probablement lu ces épisodes il y a peu de temps, dans l'intégrale 1992-1993 d'Adam Warlock, où est publié la série Warlock & the Infinity Watch. Et bien ici, à défaut d'être une suite directe, nous avons affaire à des épisodes apocryphes qui se déroulent justement à cette époque-là. On retrouve également Nebula, qui passe un sale moment avec celui qu'elle considère comme son père, c'est-à-dire notre cher titan Fou, outre les habituelles machinations de ce dernier, qui à défaut d'être devenu fréquentable, passait alors pour une sorte de super vilain fataliste et philosophe à deux doigts de se réformer définitivement, mais dont tout le monde se méfiait en raison d'un potentiel maléfique inné et incontrôlable. C'était l'époque où on le retrouvait tel un bon fermier, assis sur le pas de la porte, en train de deviser sur le sens de l'existence et la vanité des grands objectifs qu'on ne peut jamais atteindre. Ce serait bien sûr exagéré de dire que le scénario de Ron Marz est d'une originalité à toute épreuve et qu'il s'agit là d'un album à la hauteur de ce que nous pouvions lire dans les années 1990. C'est par contre un bonbon nostalgique qu'on peut réserver à ceux qui ont connu l'époque en direct, et qui comprennent ce que les deux artistes sont en train de faire, et également quelle est en outre la portée symbolique de leur présence sur ces pages. Attention toutefois, la plaie n'en finit plus de se rouvrir à ce sujet. Prenez Thanos, par exemple. Tant qu'il apparaissait sporadiquement, voire même disparaissait pendant longtemps de la scène, avant de revenir sous forme d'un Titan ultra puissant, prêt à annuler la moitié de l'univers, il était nimbé d'un prestige exceptionnel, qui lui a permis de devenir ce personnage à part. Aujourd'hui, après avoir été exploité à toutes les sauces et battu régulièrement par un peu tout le monde, qui peut encore avoir la même idée de Thanos, qui peut encore autant trembler qu'à cette époque où il endossait enfin le gant du pouvoir? Si pour vous le vrai cosmique Marvel, ce sont les années Jim Starlin, je vous recommande tout de même de jeter un œil à Silver Surfer Rebirth. Ça semble taillée pour vous, cette sortie-là!





RECKLESS ÉLIMINER LES MONSTRES : TROISIÈME MANCHE CHEZ DELCOURT




 Ed Brubaker et Sean Phillips, voici un duo qui ne chôme pas. Ils en sont déjà à leur troisième roman graphique en l'espace d'un an, avec un personnage devenu incontournable en aussi peu de temps, Ethan Reckless. Chacune des aventures de ce type chargé de résoudre vos problèmes, de quelques natures qu'ils puissent être, dans des polars ultra bien ficelés et intelligents, sont devenus des instants de lecture précieux et recherchés par beaucoup de lecteurs, moi y compris. Ce troisième volume s'ouvre alors que le cinéma dans lequel Ethan habite est en flammes. On devine que comme à son habitude, il s'est mis dans de bien mauvais draps en acceptant une mission qui est partie de travers. Pire encore, cette fois les relations avec Anna, la jeune fille qui partage son quotidien et l'aide pour gérer les affaires courantes dans ses activités, est en train de péricliter, comme il est juste que cela soit. Anna souhaite avant tout une vie normale et si elle est papillonne d'une relation à l'autre, elle semble avoir cette fois trouvé le bon, celui avec qui construire quelque chose, et donc avoir la nécessité de s'éloigner. Le blues pour l'ami Reckless, qui a bien du mal à encaisser le choc, même si toute les émotions qu'il ressent reste bien enfouies en lui depuis un accident dont il a été victime. Pour sa part, sa nouvelle enquête consiste à s'immiscer dans une affaire de pontes de l'immobilier. Des constructeurs que tout oppose, l'afro-américain Isaac Presley et le perfide Runyan, plus particulièrement les origines ethniques, ce qui a son importance dans la jungle des promoteurs californiens des années 1980. 





S'il est une chose qu'il est possible de remarquer dans ce troisième volume des aventures de Reckless, c'est que cette fois les failles viennent plus de l'intérieur que d'événements extérieurs. Si vous retirez la jeune Anna de l'équation, que reste-t-il à cet homme solitaire qui est payé pour résoudre les problèmes des autres, mais qui n'est pas toujours en mesure de se rendre compte de quels sont les siens véritables, ce qui induit un sentiment de solitude et ce réflexe malheureux de s'emmurer à l'intérieur de soi-même, ou de manière moins métaphorique, dans un vieux cinéma de quartier que plus personne ne fréquente. Une troisième aventure d'autant plus intéressante et pertinente que Ed Brubaker s'est parfaitement documenté sur la réalité du monde des promoteurs immobiliers dans les années 1980. Il sait ce dont il parle et c'est une tranche de l'histoire de la Californie qui est aussi mise en valeur dans ce récit, où il est question de trahison, d'ambition, de mensonges, de corruption, de ce qui se passe lorsqu'on précipite le cours des événements, même lorsqu'on a raison et le bien de son côté. Comme à son habitude, Sean Phillips accompagne son compère dans cette aventure. Est-il possible de déceler par endroits quelques petites baisses de forme, quand on sait le rythme effréné qu'a pris ces derniers mois la production des graphic novels consacrés à Reckless? Pour être honnête, il me serait impossible d'affirmer avec certitude qu'il s'agit là de son meilleur travail; pour autant on retrouve tout ce qui fait la grande classe de cet artiste, le cadrage cinématographique et un dessin faussement old school, parfaitement mis en couleur d'ailleurs par son propre fils Jacob. Il est assez rare qu'un personnage devienne un classique instantané comme l'a été Reckless. Chaque nouvel aventure, chaque nouvel album utilise les mêmes codes, pour arriver à un résultat différent, et avec ce troisième opus, nous avons même une variation sur le thème, à savoir la fragilité de l'intime, qui commence à poindre. Il ne faut pas non plus sous-estimer la scène finale qui nous projette plus avant dans le temps et nous permet de comprendre que le meilleur, ou en tous les cas le plus poignant, reste toujours à venir. Ce troisième tome réserve donc plus ou moins le même effet que les autres, à savoir qu'on l'achève en ayant en tête une seule pensée : aller tout de suite vérifier sur Internet s'il est possible de trouver la date de sortie du prochain. Tel est l'effet de cette série totalement indispensable, disponible chez Delcourt.




LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : ANA ET L'ENTREMONDE


 Dans le 136e épisode de son podcast, Le bulleur on vous présente Par l’ouest vers les Indes, premier tome de la série Ana & l’entremonde que l’on doit au scénario de Marc Dubuisson et au dessin de Cy., édité chez Glénat. Cette semaine aussi, on revient sur l’actualité de la bande dessinée et des sorties avec :

– La sortie du 7e tome de la série Aya de Yopougon que l’on doit au scénario de Marguerite Abouet, au dessin de Clément Oubrerie et c’est édité chez Gallimard

– La sortie de l’album Les sauveurs que l’on doit au scénario conjoint de Fabien Morin, Julien Derain et Laurent Hopman, au dessin de Chhuy-Ing Ia et c’est édité chez Deman éditions

– La sortie du deuxième et dernier tome de Ténébreuse que l’on doit au scénario de Hubert, au dessin de Vincent Mallié et c’est édité chez Dupuis dans la collection Aire libre

– La sortie de l’album Vergès, une nuit avec le diable que l’on doit au scénario de Jean-Charles Chapuzet, au dessin de Guillaume Martinez et c’est édité chez Glénat dans la collection 1000 feuilles

– La sortie de l’album L’ombre des pins que l’on doit au scénario conjoint de Valérian Guillaume et Cécile Dupuis, qui signe aussi le dessin, et c’est édité chez Virages graphic

– La sortie en intégrale de Peepshow que l’on doit à Joe Matt et aux éditions Vagator dans la collection Revival





LE PODCAST LE BULLEUR PRÉSENTE : BILLY LAVIGNE

 Dans le 196e épisode de son podcast, Le bulleur vous présente Billy Lavigne que l’on doit à Anthony Pastor, un ouvrage publié chez Casterma...