Adam Warlock fait partie des personnages que je préfère. Son destin oscille entre le tragique et le méta-physique, et c'est une créature à part, sans véritables racines, souvent au centre des plus belles sagas cosmiques, et nimbé de mystère et de décadence imminente. Nous le retrouvons en 1977 dans le septième annual des Avengers, pour la première partie d'une aventure en deux volets qui marquera le genre super-héroïque. Adam venait de s'allier à Thanos pour vaincre le Magus, une version possible et futuriste de lui même, corrompue et possédée par le coté noir de son être. Mais le Titan est toujours prêt à trahir, d'autant plus que ses motivations profondes sont effrayantes : toujours amoureux de la mort, qui l'a repoussé, il décide de lui offrir en holocauste le cosmos tout entier, d'en éteindre toutes les étoiles, pour enfin connaître les caresses délicieuses de sa bien aimée sinistre. Ses alliés en font vite les frais, comme Gamora, femme la plus dangereuse de l'univers, qui est aussi sa garde du corps officieuse; la voilà trépassée. Warlock, mais aussi Captain Marvel, ou encore Moondragon, doivent se réunir et aller recruter une force de frappe conséquente pour investir la base stellaire de Thanos, et mettre fin aux plans du maudit. Ce sont les Avengers qui sont enrôlés pour cette mission périlleuse, qui consiste à arracher les joyaux de l'âme que Thanos souhaite utiliser pour ses desseins morbides. Protégé par une armée de créatures extra-terrestres patibulaires, et bien décidé à faire mordre la poussière à ses opposants, Thanos se révèle aussi puissant qu'imbu de lui même. Mais pour le terrasser, il faudra un sacrifice, une personne disposée à renoncer à la vie pour que les autres puissent avoir une chance d'en finir. Adam Warlock est de cette trempe. Bonne nouvelle : ce drame nous donne l'occasion de lire une des plus belles pages de toute l'histoire du comic-book : notre héros, ainsi que Gamora et Pip Le Troll, ses seuls vrais amis, s'en vont bras dessus bras dessous dans le Monde de l'âme, à l'intérieur du joyau que Warlock portait sur le front, dans la sérénité et l'entente la plus parfaite. Pendant ce temps, sur le plan physique, son corps gît désarticulé aux pieds des Vengeurs qui perdent ainsi dans de funestes circonstances un des plus grands paladins de l'univers. Il fallait bien le génie de Jim Starlin pour écrire de tels moments, poignants, émouvants. Il s'agit là de la dernière planche la plus belle et évocatrice que je n'aie jamais lu dans ce genre de bande-dessinée. Une réussite totale, fignolée par l'encrage de Joe Rubinstein, le même qui était venu nous faire un petit coucou sur UniversComics lorsque j'ai publié un de ses dessins sur la page Facebook. Certains équilibres sont fragiles, délicats. C'est le cas ici. Une alchimie précieuse à suivre dans le second annual de Marvel Two In One, la même année. Nous en parlerons bientôt. Cette histoire a été publiée en Vf sur les pages de Étranges Aventures n° 61, et plus tard sur celles de Strange Origines 244, en 1990.
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