Nous sommes en 1993 dans Fantastic Four 381. Le scénariste Tom DeFalco décide de mettre en scène la mort d'un personnage capital; Reed Richards le chef des fantastiques est vaincu par son ennemi de toujours le Docteur Fatalis. A première vue il est incinéré dans une ultime tentative du dictateur mourant pour liquider son rival et l'emporter dans la tombe. Mais ce drame n'est pas arrivé du jour au lendemain. Depuis son avènement sur la série au début des années 90, DeFalco a fait vivre au quatuor une longue série d'épreuves personnelles qui n'ont épargné personne. Un par un les Fantastiques on connu l'enfer.
La Torche par exemple a mis le feu à l'université de New York de manière accidentelle, en voulant se défendre face a deux ennemis qui souhaitaient lui faire la peau. Réflexe dicté par la peur et le désespoir, compréhensible, mais qui coûta à son équipe une banqueroute presque totale, lorsqu'il fallu indemniser les victimes et sauver le jeune homme de la prison. En parallèle le pauvre Johnny devait accepter la grossesse de Lyja une skrull qui avait durant quelques années remplacé la sculptrice Alicia Masters, et qui était devenue sa femme! Un imbroglio sentimental qui a de quoi vous faire perdre la tête.
Susan, la soeur, a été de nouveau infiltré et dominé par son côté négatif et violent : Malice. Affublée d'un nouveau costume aussi osé que vulgaire, elle doit également gérer l'arrivée sur la scène de son fils devenu adulte, quelques secondes après qu'il ait été enlevé encore jeune enfant. Une fois téléporté avec son grand père et revenu à son époque de départ, comment Franklin aurait pu convaincre sa mère d'être bien lui-même, alors qu'il venait de gagner une décennie au minimum en quelques secondes?
La Chose aussi a beaucoup souffert : Ben a été défiguré par les griffes en adamantium de Wolverine et cache son visage sous un masque métallique. Une ancienne petite amie, Sharon Ventura, est réapparue dans sa vie, mais puisque celle-ci a trahi Fatalis pour qui elle jouait au départ les espionnes, la punition a été sévère! La voici transformée en un monstre encore plus grotesque que son ancien petit ami. Alors vous comprendrez que lorsque le leader des fantastiques, Reed Richards, connaît une fin tragique, incinéré aux yeux de tous, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Est-ce la fin des fantastiques?
A l'époque, les FF étaient publiés dans Nova, qui abordait sa transition du petit format historique, au grand format. On pourra dire ce qu'on veut du run de De Falco, mais certainement pas qu'il était ennuyeux. On avait droit chaque mois à des épisodes truffés de sous-trame, et de coups de théâtre à la limite du vraisemblable, mais qui ouvraient des pistes pour les nombreux numéros à venir. La recette était simple : une écriture classique (avec parfois trop de verbiage pontifiant ou de bulles de pensées redondantes), pas mal de marivaudage et de la tension sentimentale (Lyja et Johnny Storm, Ben Grimm qui veut revoir Alicia alors que Sharon Ventura rentre à nouveau dans sa vie, les époux Richards qui se disputent à chaque page...), et de l'action, encore de l'action, impliquant une galerie de personnages attachants, avec de bonnes intuitions, très fonctionnelles (Devos le dévastateur qui veut détruire toutes les formes de vie au nom de la paix galactique, Paibok le skrull , Franklin Richards qui se retrouve propulsé à l'âge adulte, Sharon Ventura devient un monstre hideux...). Au dessin, Tom était aidé par un Paul Ryan vraiment remarquable. Auteur en outre d'une partie du "plot" de départ (il avait son mot à dire quand à l'évolution de l'action), Ryan livre la plupart du temps des planches d'une grande lisibilité, avec des personnages identifiables et une belle minutie dans les détails, sans jamais sauter un épisode ou passer la main pour un fill-un de derrière les fagots. Plusieurs années de fidélité pour une longue saga, un long run qui peut se relire avec trépidation, mais uniquement en Vo et sous forme de single issues, car à ce jour pas d'omnibus, de Tpb qui se suivent et reprennent tous ces épisodes. Bien sur, encore moins besoin d'évoquer la Vf, sauf si vous avez les vieux Nova dans votre collection. C'est ce que j'appelle une histoire sérielle sans complexe, qui ne s'embarrasse pas de singer la réalité, qui s'amuse à s'épanouir et à épater le lecteur comme devraient le faire tous les bons comics qui privilégient l'histoire au détriment des tours de manche d'artistes en mal de reconnaissance. Je vous assure, quand Fatalis serre la main de Reed Richards, et que sur la cover du #381 le "four" est barré, et que s'étalent les mots no more, ça le fait vraiment. Le lecteur adolescent que j'étais alors en garde un excellent souvenir, celui d'une époque où le sens of wonder n'avait pas encore le drapeau en berne, et où on se laissait berner par ce genre de rebondissements improbables.
Ps : Reed resta "mort" pendant suffisamment longtemps pour titiller les lecteurs. Mais promis, je vous parlerai de la suite du Run de DeFalco une prochaine fois. Comme indiqué dans le titre, cet article est juste une "part one". A suivre...
A l'époque, les FF étaient publiés dans Nova, qui abordait sa transition du petit format historique, au grand format. On pourra dire ce qu'on veut du run de De Falco, mais certainement pas qu'il était ennuyeux. On avait droit chaque mois à des épisodes truffés de sous-trame, et de coups de théâtre à la limite du vraisemblable, mais qui ouvraient des pistes pour les nombreux numéros à venir. La recette était simple : une écriture classique (avec parfois trop de verbiage pontifiant ou de bulles de pensées redondantes), pas mal de marivaudage et de la tension sentimentale (Lyja et Johnny Storm, Ben Grimm qui veut revoir Alicia alors que Sharon Ventura rentre à nouveau dans sa vie, les époux Richards qui se disputent à chaque page...), et de l'action, encore de l'action, impliquant une galerie de personnages attachants, avec de bonnes intuitions, très fonctionnelles (Devos le dévastateur qui veut détruire toutes les formes de vie au nom de la paix galactique, Paibok le skrull , Franklin Richards qui se retrouve propulsé à l'âge adulte, Sharon Ventura devient un monstre hideux...). Au dessin, Tom était aidé par un Paul Ryan vraiment remarquable. Auteur en outre d'une partie du "plot" de départ (il avait son mot à dire quand à l'évolution de l'action), Ryan livre la plupart du temps des planches d'une grande lisibilité, avec des personnages identifiables et une belle minutie dans les détails, sans jamais sauter un épisode ou passer la main pour un fill-un de derrière les fagots. Plusieurs années de fidélité pour une longue saga, un long run qui peut se relire avec trépidation, mais uniquement en Vo et sous forme de single issues, car à ce jour pas d'omnibus, de Tpb qui se suivent et reprennent tous ces épisodes. Bien sur, encore moins besoin d'évoquer la Vf, sauf si vous avez les vieux Nova dans votre collection. C'est ce que j'appelle une histoire sérielle sans complexe, qui ne s'embarrasse pas de singer la réalité, qui s'amuse à s'épanouir et à épater le lecteur comme devraient le faire tous les bons comics qui privilégient l'histoire au détriment des tours de manche d'artistes en mal de reconnaissance. Je vous assure, quand Fatalis serre la main de Reed Richards, et que sur la cover du #381 le "four" est barré, et que s'étalent les mots no more, ça le fait vraiment. Le lecteur adolescent que j'étais alors en garde un excellent souvenir, celui d'une époque où le sens of wonder n'avait pas encore le drapeau en berne, et où on se laissait berner par ce genre de rebondissements improbables.
Ps : Reed resta "mort" pendant suffisamment longtemps pour titiller les lecteurs. Mais promis, je vous parlerai de la suite du Run de DeFalco une prochaine fois. Comme indiqué dans le titre, cet article est juste une "part one". A suivre...
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