MOON KNIGHT : LA MISSION DE MINUIT


 Il était improbable que la sortie de la série Moon Knight, sur Disney Plus, ne soit pas précédée d’une nouvelle version au format comic book, chez Marvel. C’est le cas avec Jed McKay et Alessandro Cappuccio, qui parviennent à proposer du neuf avec un personnage qui ne l’est pas, et qui a connu des hauteurs vertigineuses, comme certains passages à vide impitoyables. La première chose à comprendre,  c’est que le dieu Khonhsu (ici toujours traduit par Khonsou) est tombé en disgrâce, et que désormais Marc Spector alias Moon Knight opère comme coupé de sa figure tutélaire. Il s’est mis au service de la population de son quartier, ceux qui notamment sortent la nuit et arpentent les rues peu tranquilles, les soir de pleine Lune. Sa “mission” est un accueil, un refuge où venir solliciter de l’aide, un havre de réconfort où tout le monde peut trouver sa place, y compris quand on est une vampire. Des vampires qui théoriquement sont des ennemis séculaires de la Lune, et qui sont les premiers adversaires de Moon Knight dans cet album. Avant que nous passions à un individu lambda et d'apparence anodine, mais dont la sueur est capable de contrôler à distance ses victimes, pour leur faire commettre toute sorte d'exactions. C'est ensuite le tour du Docteur Badr, égyptien, qui se revendique lui aussi comme étant le "poing de Khonshu". Après tout, le dieu est comme nous autres, il a probablement deux mains, donc deux poings, ce qui fait du Hunter's Moon une sorte de frère pour Moon Knight, même si les intentions et les méthodes semblent différer. Y compris au niveau de l'apparence physique, du costume, qui forment comme le négatif de notre "héros". Pour autant, le vrai vilain dans cette histoire n'est pas encore apparu, mais il tire les ficelles dans l'ombre, sans prendre trop de risques... 


McKay prend son temps avec ce nouveau titre, au point que souvent les épisodes pris séparément sont lisibles et ressemblent à des aventures isolées, des séquences indépendantes dont le grand drama final est encore nébuleux, mais qui peu à peu forment un ensemble cohérent (qui sera encore plus évident dans le tome 2), ce qui permet à Moon Knight d’évoluer sur un territoire vierge, et donc de se réinventer tout en conservant des caractéristiques rassurantes pour le lecteur. Bonne pioche que ce docteur Badr qui apparaît d'abord comme un ennemi acharné de Moon Knight, puis prête main forte dans le besoin. Le genre de personnage qui s'inscrit dans une logique évidente, et qui donc trouve sa place sans qu'il soit besoin de forcer le scénario. McKay fait preuve de pas mal de bonnes petites idées, inoffensives en apparence. Les séances chez la psychiatre sont rythmées par des dialogues qui font souvent mouche, et renforcent le caractère énigmatique d'un héros qui est à la croisée des chemins, et doit se réinventer après avoir perdu presque tous ses affects, avec des choix malheureux et un comportement erratique. Alors le scénariste ajoute de nouveaux intervenants, et on prend plaisir au retour sur scène de Nelson Greer, alias Tigra, ancienne compagne d'aventure à l'époque des Vengeurs de la Côte Ouest. L'allusion à la judéité de Marc Spector, et son renoncement pour embrasser la mission d'un autre dieu, sont également bien amenés, et montre que l'auteur a bien cerné le personnage dont il a hérité. Au dessin Alessandro Cappuccio (jusque là vu uniquement en Vf chez Shockdom avec le premier volume de la série des Timed) réussit le tour de force de mettre en image "son Moon Knight". Pas une version en élégant costume blanc, ou le traditionnel spectre lunaire, mais un héros urbain et sombre, qui se fond dans l’obscurité en s’y lovant, dont le costume devient par moment comme une carapace souple, tant l’artiste ajoute une certaine rigueur, une puissance physique granitique dans les poses, les combats, les interventions sorties de nulle part. Plutôt que d'être caractérisée par un suaire blanc élégant en mouvement, c'est par le noir que se dessine la plastique du justicier, alors que la blancheur éclatante ne semble souvent que des reflets, qui le rendent encore plus inquiétants. Un choix fort intéressant, et efficace. Pour un tome un qui sait vous atteindre et vous convaincre, sans pour autant monter trop vite en régime. Une bien bonne surprise. 



Le Mag' #23 84 pages, gratuit, est disponible : 




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