Vous pensez vraiment que la carrière de scénariste de comic-books est de tout repos? Qu'il suffit d'aller faire une petite balade en forêt ou de se pointer au bar du coin pour trouver l'inspiration et pondre un chef d'oeuvre qui va concourir à l'Eisner Award? Si on en croit James Robinson, le processus créatif ressemble plus à une lente agonie, lorsqu'il s'agit daller creuser à la petite cuillère le fond d'une cervelle tarie, à la recherche désespérée de la moindre idée. Surtout quand on connaît une baisse de régime, et que notre carrière a tendance à flirter avec les fonds abyssaux. Bon, Robinson exagère, et beaucoup d'entre nous apprécient vraiment son job, chez Marvel ou Dc. Mais c'est ainsi qu'il lui plait à se mettre en scène dans Airboy, une nouvelle série où les artistes sont les héros, au moment où Image le contacte pour lui demander de reprendre le personnage (Airboy donc), un aviateur descendant du nazi autrefois, aujourd'hui tombé dans le domaine public. James n'a aucune envie de s'y mettre, et pas la moindre piste pour griffonner le premier feuillet, et le seul élément qui pourrait lui donner l'étincelle, c'est de faire appel à un dessinateur branchouille (Greg Hinkle) pour unir les forces et commencer sérieusement à bosser. C'est exactement ce qui se passe, sauf que le travail en question ressemble à un remake de Trainspotting, entre prise de drogue exagérée, soirées fortement alcoolisée, sexe avec une inconnue pêchée dans un bar (un gros modèle oversized) et autres menus délires bien loin de ce que vous pourriez imaginer être le quotidien de ces ascètes du format comics. Formidable mise en abîme portée par un humour qui fait mouche, même si l'auteur épaissit le trait au pont de donner dans la caricature fantasmée de l'artiste maudit qui ne peut concevoir que dans le stupre et le vice, Airboy atteint sa cible avec aisance. L'histoire se laisse lire très facilement, et réserve une ultime planche suffisamment énigmatique et jouissive pour nous pousser à attendre fébrilement le second numéro. Ici les références sont réelles, les blagues auto-référencées et basées sur ce qui existe (comme quand Robinson regrette d'être un scénariste qui est cantonnée dans les vieux personnages ou les équipes du golden age...), et le titre puise son inspiration tout entière dans le quotidien de notre passion, de ceux qui en vivent, la font, la lisent, l'analysent. Panne créative, inspiration prise dans le bourbier du temps et de la routine, ici l'héroïsme est remplacé par la gaudriole, le manque, l'attente, l'angoisse, et une grosse couche d'humour. Airboy est une série fortement décalée, et pour cette raison à suivre de très près.
A lire aussi :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Vous nous lisez? Nous aussi on va vous lire!