AMERICAN MONSTER TOME 1 : LE NOUVEL AZZARELLO CHEZ SNORGLEUX

La raison évidente pour laquelle il nous fallait investir dans American Monster, c'est la présence de Brian Azzarello au scénario. En somme, pour peu que vous ayez accroché au grand oeuvre 100 Bullets, ces histoires sombres et glauques, à base de flingues, de bars miteux et d'existences bancales, il y a de fortes chances pour que vous bénédissiez l'arrivée de Snorgleux Comics, qui publie ce titre en Vf. Le récit démarre avec deux lignes narratrices différentes. Tout d'abord un couple qui est sauvagement agressé à son domicile. La femme est vraiment malmenée, et le final pour les deux époux sera encore pire, avec une horrible décision à prendre, et une mort commune inévitable. Pas de concession à la poésie, bienvenue en territoire ultra violent. Ensuite l'arrivée dans un bar d'une sorte de colosse défiguré, croisement génétique entre un personnage de Sin City et un des hommes de main chers à Brian Azzarello. Son véhicule est en panne, et il en profite pour une mousse, tout en étalant un mauvais caractère et une dangerosité qui suine de ses faits et gestes. Le type attire la foule des curieux du bled, qui se partagent entre jeunesse désoeuvrée ou retardés lentaux. Dans son colimateur, le gang du coin, formé par des anciens militaires qui ont fait fortune en vendant des armes. Foin de vengenace à la justicier redresseur de torts...et si en fait il s'agissait surtout de devenir le nouveau boss local? Voici un étranger certes victime, à la base, mais qui n'inspire pas la moindre compassion, et qui se nourrit de la méchanceté la plus pure.  

Le midwest d'Azzarello n'est pas taillé pour le format carte postale. On le verrait plutôt s'inscrire à la rubrique faits divers. Pour cette production qu'on doit à l'origine au nouveau label Aftershock Comics, on nage bien en plein dans le récit noir et pulp, où la tension règne entre chaque planche, et où la violence explose régulièrement, comme d'inévitables (et même attendues) déflagrations. Outre une vision foncièrement très négative du genre humain (avec des personnages réellement dégrandants), le scénariste place aussi quelques banderilles à l'encontre de la société américaine, son étroitesse de vue, sa jeunesse désoeuvrée, les compromis permanents comme raccourcis pour quelques dollars. 
Au dessin, nous trouvons Juan Doe, qui s'inscrit dans un style proche de celui de Risso (100 Bullets, donc), avec une utilisation efficace et inspirée des noirs, et de couleurs vives comme le rouge de l'hémoglobine qui parcourt ce récit. La mise en page, l'évolution de l'action, n'est pas toujours parfaite, le dessinateur privilégiant l'efficacité des scènes et l'impact visuel qu'elles ont sur le lecteur. D'où le choix de plans en contre plongée, où saisis par derrière le "héros" de l'histoire, qui permettent de manifester sa supériorité physique, son pouvoir formel, sur les petits personnages insignifiants à ses yeux, qu'il dompte de sa carrure et de sa violence. 
American Monster est donc recommandé à celles et ceux qui ont besoin de leur dose régulière de turpitudes à la Azzarello, mais il manque pourtant encore ce soupçon d'âme pour en faire une grande bande-dessinée. La lecture est tout sauf désagréable, mais joue tout de même sur des cordes et des tons déjà largement fréquentés. Mais 100 Bullets aussi avait eu besoin de temps et de recul, pour être apprécié pleinement pour le chef d'oeuvre qui s'est dessiné ensuite. 



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