C'est Simon Treins qui est au scénario de ce qui s'annonce comme un diptyque : la seconde partie est d'ores et déjà prévue pour le début de l'année 2025. À mon sens, ce qui fait l'intérêt de cet album (et la raison pour laquelle nous l'avons particulièrement apprécié) c'est que les goules ne sont pas présentes d'un bout à l'autre. En fait, il ne s'agit pas d'une course à l'horreur effrénée, d'une accumulation de scènes de carnage. Au contraire, nous suivons Randolph Carter dans ses pérégrinations, avec la rencontre d'un autre légionnaire qui va devenir son ami, mais qui en secret a bien d'autres objectifs. Et surtout, l'étrange pendentif qu'il porte autour du cou et qui semble lui attirer beaucoup de curiosité, mais aussi des problèmes. C'est donc un récit qui prend la forme d'une enquête, qui laisse planer de sombres présages, notamment de trahison, et qui dessine les contours d'un culte mondial, des tunnels du métro de New York au Moyen-Orient. Jovan Ukropina est une fois de plus irréprochable au dessin, avec un travail très soigné, qui permet de proposer une caractérisation convaincante et réussie de chacun des personnages, mais aussi de transporter le lecteur, même dans les scènes statiques, avec des paysages détaillés et très minutieux. Le découpage des planches est habile, maintient l'intérêt et rend l'évolution de l'action aussi lisible qu'efficace. La lisibilité est vraiment la qualité de "La ville sans nom"; on a parfois lu des adaptations des œuvres de Lovecraft qui donnent dans la surenchère et finissent par faire tourner la tête du malheureux lecteur, à qui l'on déverse incantations, maléfices et horreur jusqu'à plus soif… ça n'est pas le cas ici. Le dosage est équilibré, ce qui mérite amplement qu'on donne une chance à cet ouvrage publié chez Soleil.
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