Ce que le spectateur lambda, qui ignore peu ou prou tout des comic-books, ne peut réaliser, c'est à quel point ce type de film représente le fantasme concrétisé de générations de lecteurs. Les X-Men de Claremont, le mythique Days of future past, qui aurait pensé les voir un jour, avec un tel réalisme, sur grand écran? Profitons-en car le songe est devenu réalité, même si au passage il a fallu pactiser avec les besoins du cinéma, c'est à dire adapter certaines parties de l'histoire, revisiter plusieurs personnages (Bishop par Omar Sy, une présence très secondaire, et franchement ratée, si vous voulez un avis personnel). Au final cela donne un long métrage de deux heures musclé et par endroits vraiment jouissif, qui ressemble fort au point de départ d'une nouvelle série de films X-Men, tant il est évident que les portes pour une décennie de succès sont grandes ouvertes. Bryan Singer reprend les choses en main avec cette intuition gagnante : récupérer une des sagas phare de l'épopée mutante, datant de 1981, pour en faire une parabole effrayante sur ce que peut devenir le futur, si la haine et la peur de l'autre sont le moteur de l'évolution sociétale. Dans ce futur (présent?) dystopique où les mutants sont impitoyablement exterminés par des Sentinelles capables d'évoluer instantanément et de s'adapter à leurs cibles pour mieux les détruire, l'espoir semble définitivement banni. Les X-Men tombent comme des mouches, et il ne reste plus qu'une seule chose à faire, aussi improbable que cela puisse paraître : envoyer l'esprit de Wolverine dans le passé, 50 ans en arrière (ses capacités auto guérisseuses en font le cobaye idéal, sa psyché s'auto réparant) pour convaincre les jeunes Charles Xavier, et Magneto, de passer une alliance afin de s'unir et de contrer Mystique, bien décidée à abattre Bolivar Trask, le père de ces Sentinelles meurtrières. Un assassinat qui a donné le ton, et ouvert la voie à un avenir haineux et sanglant. Et un assassinat qui n'est pas simple à éviter, car la mutaforme est plus décidée que jamais, et les deux meneurs mutants (Xavier et Magneto) divisés par des points de vue radicalement différents, ont bien du mal à se faire confiance et à travailler main dans la main. Au passage, tout ça se passe dans les années 70, baby. Vive la nostalgie.
Costumes d'époque, musique vintage, on a droit à la panoplie des clichés, mais ça fonctionne aussi grâce à l'humour, qui n'est pas en reste dans ce film. A ce sujet, j'ai vraiment apprécié la version ciné de Quicksilver. Les photos et les impressions étaient très réservées, mais j'avoue avoir changé d'avis. Ultra cool et décalé, on rêve déjà d'un petit spin-off de derrière les fagots, histoire de rire un bon coup. Les acteurs sont souvent justes, Fassbender est tout simplement impressionnant (est-ce une nouveauté? Non) et McAvoy, trop transparent dans The Beginning, gagne cette fois en conviction et en dramaturgie. La vieille génération (Halle Berry, Patrick Stewart...) est présente pour toute la partie qui concerne le futur, et même si les deux époques ne cohabitent jamais (hormis une scène entre les deux Xavier d'hier et de demain, qui reste sur le plan mental et non physique) l'hommage entre la première trilogie, déjà victime des ravages du temps et de la progression inexorable des moyens techniques qui rendent ce genre de film si banal, et la franchise "moderne" est émouvant et révélatrice. Une page s'est déjà tournée dans l'histoire des comics au cinéma, les tâtonnements d'autrefois sont désormais remplacés par un filon aurifère inépuisable dans lequel tous les réalisateurs rêvent de plonger les mains pour en sortir des pépites plus ou moins brillantes. Tant qu'à parler de générations, les gros plans sur le visage de Hugh Jackman sont impitoyables, notre Wolverine n'est pas comme celui de papier. Il vieillit (assez bien) et tôt ou tard il faudra bien envisager un nouveau "Serval" pour ce rôle si délicat, et si bien campé. Reste que ce Days of future past est une orgie. Une fête foraine gigantesque où le lecteur Marvel est invité à prendre place sur tous les manèges, quitte à en sortir avec un beau mal de crâne. Sans grosse fausse note, sans erreurs impardonnables, avec de belles fulgurances et des intuitions intelligentes (les Sentinelles évolutives, ou encore ce Trask de petite taille qu'on ne peut que détester d'entrée, avec cette suffisance et cette ardeur à détruire), voilà encore un long métrage hautement recommandable, à base de héros en costumes et de pouvoirs formidables. La mode n'est pas près de s'éteindre, à ce rythme! Prochain étape pour Marvel, Guardians of the Galaxy en août, et là, ce n'est pas gagné d'avance.
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