BATMAN TOME 7 : MASCARADE

C'est un fait, le Batman de l'opération New 52, c'est celui de Capullo et Snyder. Une empreinte indélébile, un style rodé et efficace. Pour juger la qualité finale d'un run qui dure depuis plusieurs années, il faudra bien sur attendre le dernier épisode de ces deux-là. Endgame constitue une étape supplémentaire dans le long récit que Snyder développe sur le titre. Le Joker a déjà mis à mal la Bat-Family et il est parvenu à mettre en doute les liens qui unissent les différents membres, dans le troisième volume publié chez Urban (Le deuil de la famille). Mais toutes ces exactions puisent leur source dans une forme malsaine et incohérente de fascination du Joker pour son ennemi, un Batman qu'il souhaite aider à s'endurcir, à se radicaliser , pour épouser sa vision des choses et trouver en notre héros une sorte de frère spirituel. Désormais, après avoir été laissé pour mort, le voici revenu avec une seule idée en tête : détruire une fois pour toutes Batman et son monde, cette Gotham qu'il assaille régulièrement et qu'il compte bien mettre à genoux une ultime fois. Bruce Wayne baisse sa garde et prend un nouveau départ, suite aux péripéties narrées dans la série Batman Eternal. Nouvelle base d'opérations, nouvelle aide de camp (la fille du majordome Alfred), mais ancienne menace... Tout commence lorsque Wonder Woman fait irruption dans la Tour Wayne et passe à tabac le milliardaire play-boy, avec dans les yeux une féroce envie de le tuer. Heureusement que Batman a toujours un remède à tous les maux et qu'il a également pour habitude d'imaginer et produire des contrefeux pour neutraliser jusqu'à ses meilleurs alliés. Ce qui se révèle très utile, car l'attaque de l'amazone n'est que le premier acte d'une agression bien plus grave. C'est la Justice League au complet qui pousse Batman dans ses derniers retranchements, et souhaite l'éliminer. Le Dark Knight se retrouve même face à un Superman qui ne retient plus ses coups, et sincèrement, on voit mal comment il pourrait lui tenir tête plus de quelques secondes. A moins d'être rusé, très rusé...

Le moment est venu pour moi de nuancer cette critique. Snyder envoie du lourd, du très lourd. Le Joker est donc parvenu à contaminer la Justice League, ainsi que la ville, avec un virus qui pousse les gens à rire jusqu'à en mourir, et à céder aux pires penchants enfouis dans l'inconscient. Ce n'est pas une nouveauté, c'est malheureusement ce que j'appellerais l'effet Walking Dead : recourir à des histoires de virus, d'infections transmissibles, pour créer un effet de suspens dramatique. Je sature. Ici ce n'est pas le pire. Non, la faute de Snyder, à mon sens, c'est de semer le trouble dans l'esprit du lecteur, en voulant lui faire avaler (ou peut-être pas d'ailleurs) l'idée que le Joker est plus qu'un simple cinglé motivé par un mal solidement ancré au fond d'une psyché dévastée. Ce qui permet de justifier, d'expliquer comment et pourquoi il a retrouvé un visage après s'être fait découpé et retirer celui-ci. C'est aussi un bon moyen d'iconiser le grand vilain, d'en faire une menace qui pourrait s'inscrire dans l'histoire et le tissu urbain de Gotham, échappant ainsi à toute possibilité d'établir une généalogie précise, et de pister ses origines pour comprendre les mécanismes de sa folie, et le stopper. Mais cette théorie détruit ce qui est le plus effrayant selon moi, à savoir que le Joker n'est qu'un homme, aussi déroutant et incompréhensible que puisse être son modus operandi. Le doute plane et planera longtemps, avec cette décision controversée de Snyder. Greg Capullo de son coté continue d'assurer un service irréprochable au dessin, alliant réalisme et mise à distance avec brio, sans jamais baisser de régime. Les petits récits de fin d'épisodes, nommés back-up en anglais, sont eux l'oeuvre de James Tynion IV et de cinq dessinateurs différents, tous des pointures et des habitués du personnage (comme Kelley Jones ou Peter NGuyen par exemple). On y découvre la machination psychologique du Joker qui parvient à semer le doute dans l'esprit de plusieurs malades échappés d'Arkham, ce qui contribue à créer ce nouveau mythe que Snyder essaie de nous faire avaler. Un tome 7 vraiment particulier, qui flirte avec l'incroyable, l'inacceptable, le sacrilège. L'avenir nous dira s'il s'agit d'un coup de génie, ou d'un coup de canif dans le contrat avec les lecteurs. Je ne suis pas pleinement convaincu, loin de là. 




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