WONDER WOMAN HISTORIA : L'OPULENTE HISTOIRE DES AMAZONES EST MAGNIFIQUE




 Depuis l'annonce de la création du Black Label, Historia fait partie des projets les plus intrigants. Nous commencions à trouver le temps long, une attente récompensée par la sortie d'un véritable chef-d'œuvre, à tout point de vue, disponible en cette fin d'été chez Urban comics. Non, il ne s'agit pas d'une énième aventure de Wonder Woman, qui reviendrait sur la genèse et le parcours du personnage, mais quelque chose de beaucoup plus ambitieux, une vraie écriture totale de la généalogie des Amazones, ce qu'elles sont, la raison pour laquelle elles existent, leur but dans l'existence, la structure de leur société : une approche conceptuelle tout aussi étiologique que téléologique, c'est-à-dire qui s'intéresse à la fois aux causes et aux effets. Nous comprenons la raison pour laquelle les Amazones sont nées et nous nous intéressons ensuite à comment leur comportement et leurs agissements vont avoir des répercussions profondes, notamment lorsque va sonner l'heure de rendre des comptes que Zeus va décider de leur faire vivre un véritable enfer, déclenchant ainsi une guerre contre les dieux. Au départ, il y a une requête menée par les déesses, présentée à celui qui est domine toutes et tous : elles exposent la manière dont les femmes sont traitées, c'est-à-dire la plupart du temps, rabaissées, humiliées ou déconsidérées. Pour simplifier et épouser l'air du temps, disons qu'il y a un discours féministe évident dès les premières pages de cet ouvrage, sauf qu'ici le discours féministe ne se contente pas d'être une charge politique et sociale stérile, de dérouler une thèse usante et moralisatrice. Il se met au service d'une véritable histoire : il y a vraiment quelque chose à raconter derrière tout cela et Kelly Sue DeConnick le fait avec brio. Chacune des déesses du panthéon romain décide ainsi de mettre ses caractéristiques à l'ouvrage et de créer une race de guerrières inflexibles et indomptables. Au total, une trentaine d'Amazones voient le jour et incarnent la revanche de la femme, l'accession à la liberté du genre féminin. La seule déesse qui ne participe pas à cet effort collectif, c'est Héra, l'épouse de Zeus. Il faut dire qu'elle a d'autres projets plus personnelles et que à la différence des autres, son omniscience lui permet de tout savoir, aussi bien ce qui s'est produit que ce qui reste encore à se produire. Toute la première partie est illustrée par Phil Jimenez et c'est absolument stupéfiant. La quantité de détails, l'attention maniacale à la plus petite des vignettes, tout ceci flirte avec la fantasmagorie, l'opulence. Il mêle le classique grec avec des influences tirées de la Renaissance, propose des portraits stupéfiants et place la barre très très haut en terme de représentation graphique du monde des Amazones. Tout ceci en est presque sidérant !




La première partie est beaucoup plus élégiaque et mythologique que les deux autres. Il faut dire que les Amazones se sont enfin incarnées, leur société va devoir évoluer, s'enrichir, notamment avec le personnage de Hippolyte, destinée à devenir une reine et qui au départ n'est qu'une femme comme les autres. Gene Ha et Nicola Scott se retrouvent dans une situation peu enviable : prendre la suite de ce qui a été fait juste avant, dans un style fort différent, tout en conservant un niveau qualitatif exceptionnel. Autre tour de force de cet album, c'est un succès total. Les deux artistes privilégieront le travail sur les textures, la manière de mettre la couleur au service du récit, proposeront quelque chose de plastiquement tout aussi fouillé mais dans un autre genre. Le discours féministe du départ se complexifie également : organiser une société avec uniquement des femmes, c'est bien entendu l'impossibilité de la voir prospérer à travers le temps, si ce n'est par le biais d'ajouts et d'adoptions et donc de faire rentrer "l'étranger", l'élément exogène. Au risque de contaminer les traditions et d'apporter un facteur perturbateur. Par exemple, les Amazones ne se déplacent que la nuit; toute intervention durant le jour risquerait de compromettre leur mission, puisqu'Apollon a un regard omniscient sur ce qui se passe sous le soleil. Alors en plus, confondre la justice et la vengeance, dans le temple dédié à ce dieu grec, c'est l'assurance de déclencher un conflit mortel à l'issue duquel il pourrait bien n'y avoir pas de vainqueur, juste des cendres. Historia se referme bien évidemment avec l'apparition de Diana. Nous ne vous gâcherons pas la surprise mais là aussi, tout cela s'insère à merveille dans une chronologie, une généalogie de toute beauté. On referme la dernière page après avoir consulté de nombreux croquis et bien des bonus pertinents, convaincu d'avoir entre les mains un des trois ou quatre meilleurs albums de l'année, sans aucun problème.


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