DOCTOR WHO : IL ÉTAIT UNE FOIS UN SEIGNEUR DU TEMPS (CHEZ BLACK RIVER)


 Nos amis anglais l'ont érigé en idole nationale, cela fait 60 ans que le Doctor Who fait partie du panthéon de la culture britannique ! D'autant plus que le personnage a la faculté de se régénérer, ce qui est bien pratique pour qu'un acteur prenne la place d'un autre, sans que cela soulève trop de protestations. En France, la série a commencé à connaître un petit succès d'estime il y a une dizaine d'années, mais nous sommes toujours loin du raz-de-marée de l'autre côté de la Manche. Côté comics, deux éditeurs avaient tenté de faire vivre le personnage chez nous : French Eyes et plus récemment encore, Akileos. Cette fois, c'est Black River qui relève le défi et ça commence avec des one shot écrits par Dan Slott, un scénariste que tout fan de comics qui se respecte connaît forcément, depuis son passage brillant sur Spider-Man et le Silver Surfer. La bonne nouvelle, c'est que même si vous n'avez jamais lu ou vu quoi que ce soit au sujet de ce bon Docteur, vous allez tout de même pouvoir profiter de l'aventure, en comprenant quasiment tout ce qui vous est présenté. L'album assez mince (72 pages) s'ouvre sur une sorte de revue d'effectif des différents docteurs à travers le temps, jusqu'au dixième; un choix évident puisqu'il s'agit probablement de l'incarnation la plus célèbre et aimée des fans, celle de David Tennant, qui fut aussi le grand vilain de la série télévisée Jessica Jones. On nous parle d'emblée d'une race extraterrestre appelée Pyromèth, des êtres qui se nourrissent des récits et contes fantastiques de leurs victimes. Une fois que ces dernières ont raconté ce qu'elles avaient à raconter, leurs enveloppes corporelles sont comme jetées aux ordures; et comme tout cela se passe dans un lieu inconnu, même du Doctor Who, mieux vaut ne pas tomber entre leurs griffes. Evidemment, c'est ce qui va toutefois se produire dans le cas de Martha Jones, cette étudiante qui n'a pas froid aux yeux et qui est la compagne d'aventures du 10e Docteur. Seulement voilà, elle a un plan et les histoires qu'elle s'apprête à raconter à ses ravisseurs vont être aussi l'occasion de mettre sur pied un récit très intelligent, une méta narration où chaque élément permet d'introduire le suivant, une poupée russe fictionnelle, bien construite par Dan Slott.



Les aventures du Docteur Who, c'est bien entendu un ensemble complexe d'éléments loufoques, de science-fiction, d'absurde, le tout constituant au fur et à mesure une sorte de mille-feuilles auto-référencié propre à un univers particulier, auquel on adhère (ou pas). Plusieurs dessinateurs vont se succéder dans cet album, en l'occurrence Mike Collins, Christopher Jones, ou Matthew Dow Smith, avec notamment une différence entre les passages dans lesquels les personnages vivent "au temps présent" et d'autres où il est question du récit que doit inventer Martha pour avoir la vie sauve. En complément de cette histoire, nous en trouvons une seconde plus brève qui s'intitule Rime ou raison. La qualité première de ces pages, c'est savoir jouer avec les mots et la phonétique. Une manière d'échapper à la traduction automatique qui permet à des extraterrestres reptiliens de comprendre ce que les protagonistes (le 9e Docteur et sa compagne, Rose) disent lorsqu'ils tentent de déjouer leurs plans. Il s'agit là aussi d'une histoire, comptée cette fois par le dixième docteur, ce qui confirme le caractère méta narratif de ce premier volume publié par Black River. Nous avons été juste surpris par le fait que l'album se présente en soft cover et non avec une couverture rigide, comme c'est le cas des autres propositions éditoriales de l'éditeur, et par les trois pages laissées blanches à la fin du livre, qui auraient pu être exploitées pour des variant covers ou des recherches sur les personnages. Par contre, côté traduction et correction du texte, ça semble s'améliorer, même si l'interview de Dan Slott, publiée en bonus, présente plusieurs erreurs assez déconcertantes. Au final, il y a fort à parier que la communauté des fans du bon Docteur Who trouvera un plaisir certain à la lecture de cet album, dont la couverture, par ailleurs de Christopher Jones, est très réussie et bénéficie d'un vernis sélectif assez efficace.



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